Clifton 24. Le dernier des Clifton

Q uelque part en Afrique, Lord Davy Buffalo Cunningham Clifton, grand amateur de chasse, surtout lorsqu'il s'agit de tuer le dernier représentant d'une espèce animale, se fait descendre par une jeune femme. Peu après, à Puddington, on tire sur Edward Fergus Gordon Horatio Clifton, père du célèbre colonel. Ce dernier fait le nécessaire pour appeler les secours. Monté dans l'ambulance qui emmène son paternel à l'hôpital, il estime que le véhicule est bien trop lent. Il s'empare du volant et se lance dans une course urbaine aussi dangereuse que farfelue, qu'il ponctue de ses insultes fleuries et de son cynisme inoxydable. Les ficelles de ces attentats familiaux sont tirées par François-Louis Ramolino, alias Napoléon Onze. C'est un certain "Serment de Shamewood", remontant à 1807, qui pousse le Français vindicatif à exterminer cette descendance, certes pittoresque, mais guère menaçante. Il n'en faut pas plus pour que le Britannique aux faux airs de Francis Blake, Miss Partridge, sa domestique, et Teardrops, un notaire londonien, se mobilisent.

Clifton a été créé par Raymond Macherot en 1959 dans Le Journal de Tintin, avant d'abandonner rapidement son détective amateur pour se consacrer à Chlorophylle, puis à Sybilline. Après deux aventures scénarisées par Greg, Bob De Groot et Turk (Robin Dubois et Léonard) reprennent le flambeau. La saga va connaître encore des aléas de personnels, mais en cet hiver 2023 paraît Le dernier des Clifton, le vingt-quatrième tome de la série, le troisième proposé par le tandem Turk et Zidrou (L'Élève Ducobu et de multiples reprises). L'album s'inscrit dans la continuité des épisodes précédents, à savoir un mélange d'intrigue policière simple, d'humour et de fantaisie débridée. Se calquent sur ce canevas un soupçon de critique politique, un peu de misogynie au second degré et un zeste d'éternelle rivalité franco-anglaise. Cela donne une aventure dynamique, drôle, dont les pages regorgent de mini-gags et les cases de clins d'œil et autres éléments désopilants.

Le langage du vitolphiliste est toujours fort proche de celui d'Achille Talon, dans sa tenue et son raffinement. Son flegme et son décalage avec son environnement font toujours mouche. Clifton sortant d'une boutique de lingerie féminine ou furetant dans un magasin de disques vinyles vaut le détour. Le dessin de Turk est fidèle à lui-même, simple, clair, désuet, mais aussi enveloppant, rassurant et riche de détails. Il y a un mois, Bob De Groot s'en est allé. Il peut être rassuré sur la trace qu'il va laisser sur la bande dessinée franco-belge et sur le respect qui est observé à l'égard de son œuvre. Le dernier des Clifton en est la preuve. Ah, ces Anglais "plus perfides qu'un accord du participe passé"!

Moyenne des chroniqueurs
7.0