Moi, Edin Björnsson Pêcheur suédois au XVIIIe siècle,…

U ne magnétiseuse propose à Édith de lui révéler sa vie antérieure. Elle la résume en quelques termes : « XVIIIe siècle, en Suède, vous étiez un homme, un pêcheur, vous aimiez les femmes, vous êtes décédé de mort violente, assassiné, sans doute par un mari jaloux ». L’autrice s’inspire de cette poignée de mots pour imaginer la biographie de celui qu’elle aurait été. Edin, bébé malingre, survit contre toute attente. Surprotégé par sa mère et sa tante, il s’émancipe lorsqu’un vagabond de passage s’affirme comme figure masculine et l’invite à prendre ses distances de la structure familiale matriarcale.

Il y a un malentendu dans Moi, Edin Björnsson. Le lecteur s’attend à un récit fantastique sur le thème de la réincarnation, mais il n’en est rien. La trame n’a rien de surnaturelle, elle se montre, bien au contraire, hyperréaliste. Il en résulte un récit austère où la vie constitue une fatalité. Le quotidien demeure âpre et il n’y a que les femmes, généralement accueillantes, pour offrir au héros une forme de réconfort.

Ces dernières forment d’ailleurs le fil conducteur du livre. D’abord, celles qui protègent le gamin, ensuite, les demoiselles qu’il convoite avec gourmandise. En apparence dominées et asservies, elles parviennent, par leur culture ou leurs charmes, à tirer leur épingle du jeu. Les hommes évoquent, pour leur part, la liberté et l’affranchissement. Ils s’enivrent et partent à l’aventure, loin d’un nid familial douillet, quoiqu’étroit. En filigrane, se lisent une société rude, la pauvreté, la maladie et la dureté des gens.

L’artiste adopte un trait relâché, rappelant celui de Gipi. Ce dessin se marie harmonieusement à la texture rugueuse du récit. Aussi, la colorisation en demi-teintes et l’abondance de clairs-obscurs soutiennent la tonalité d’une narration plutôt sombre.

Un petit conte réaliste, porté par des personnages attachants.

Moyenne des chroniqueurs
7.0