Les piliers de la Terre 1. Le Rêveur de cathédrales

A ngleterre, 1135. Non ! Aliena, fille du comte Bartholomew, le clame haut et fort : elle refuse d’épouser William, le fils des Hamleigh. Fou de rage, ce dernier quitte Earlcastle en promettant d’obtenir ce qu’il veut, de gré ou de force. Quelques mois plus tard, à Londres, Stephen, neveu du roi, profite du décès impromptu de son oncle et du jeune âge de l’héritier pour se faire couronner, avec l’appui de nobles et de clercs intéressés par ses promesses. Au même moment, faute d’avoir trouvé des chantiers où s’employer, Tom, un maître maçon, est contraint de louer ses bras de villes en villages, afin de nourrir les siens. Son épouse morte en accouchant, il abandonne son nouveau-né dans la forêt, avant de rencontrer Ellen, une femme au verbe haut, et son garçon, Jack, avec lesquels la famille poursuit sa route. À quelques lieues de là, le frère Philip se rend à l’abbaye de Kingsbridge, en ébullition depuis la disparition du prieur.

Classiques ou best-sellers, les romans constituent une source d’inspiration pour tous les arts. Le neuvième y puise volontiers et les bandes dessinées adaptant l’une ou l’autre œuvre-phare, tous genres confondus, fleurissent, en engendrant appréhension ou exaltation chez les lecteurs. Il paraissait donc inévitable que la saga historique de Ken Follett connaisse, à son tour, une déclinaison en BD, surtout après avoir reçu les honneurs d’une mini-série télévisée (2010), d’un jeu de société (2006) et d’un jeu vidéo (2017). Pour sa mise en cases et images, Les Piliers de la terre bénéficie de l’association d’un trio d’auteurs : le scénariste Alcante (l’éclatant La Bombe, LaoWai et Pandora Box, entre autres), le dessinateur Steven Dupré (Le faucon déniché, Pour que respire le désert, Kaamelott) et le coloriste Jean-Paul Fernandez (Hérauts , Indochine, Nevada). Publiée par Glénat qui ne manque pas d’y mettre les formes – communication efficace et tirages de tête pour les collectionneurs -, la fresque est annoncée en six volets aux paginations conséquentes ; « du lourd » en perspective.

Alors ? Que le bédéphile amateur du roman se rassure, le récit originel est amplement respecté, en dépit de quelques coupes inévitables, et cette première partie saura le replonger dans les vies mouvementées de Tom, Ellen, Jack, Aliena et des autres. Le néophyte, quant à lui, a le plaisir de découvrir une histoire aux multiples fils, dosant savamment politique, religion, amitié et romance, avec évidemment son lot de péripéties et de trahisons. Reprenant les onze chapitres initiaux du livre, Le rêveur de cathédrales plante le décor – celui d’une Angleterre du XIIème siècle agitée par une querelle de succession – et présente les personnages, nombreux et bien définis dans leurs caractères respectifs. Menée adroitement, la narration se révèle fluide malgré la quantité d’informations dispensées à travers des dialogues qui permettent de cerner l’ampleur des enjeux, sans plomber la dynamique d’ensemble. Par ailleurs, très rapidement, les différentes intrigues s’entremêlent pour culminer en fin d’album qui laissent les comploteurs en position de force et les héros dans une situation précaire.

S’appuyant sur une ample documentation, la partie graphique se révèle soignée et reconstitue au mieux l’époque évoquée, notamment à travers châteaux, monastères et vêtements dont les détails et décors témoignent de la méticulosité apportée par Steven Dupré. La construction des planches et les cadrages assurent une immersion au cœur des événements, que ce soient à travers des vues en hauteur dévoilant toute la majesté des lieux ou des plans rapprochées axés sur les protagonistes. Le style réaliste donne vie à une galerie d’acteurs tous assez reconnaissables et expressifs. La mise en couleurs habille efficacement, quoique sagement, l’ensemble.

L'ouverture de cette adaptation BD des Piliers de la terre possède les qualités nécessaires pour combler les amateurs d'épopée historique et donner envie de (re)plonger dans le best-seller de Follett - qui signe la préface de l'album. Un bon début, en somme.

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Moyenne des chroniqueurs
6.0