Shi (Zidrou/Homs) 6. La Grande Puanteur

Été 1858, Londres suffoque et la Tamise n’est plus qu’un cloaque à ciel ouvert. Pendant que Senseï panse les plaies de Kita, du fond de sa geôle, Jay s’essaye à consigner, sur les marges des feuillets d’un roman de Dickens, les évènements des mois derniers : Les Angry Mothers ont été défaites à Trafalgar square dans un bain de sang, mais les services de sa gracieuse Majesté ont fait en sorte que nulles traces ne subsistent ! Alors cette fois, la lutte doit continuer de manière plus radicale…

La grande puanteur se dévore d’un trait et entraîne le lecteur dans un espace dessiné, où les 50’s made in US enlacent une seconde partie d’un XIXe siècle victorien, où la vieille Europe industrieuse découvre les démons d’un Japon encore féodal et où la fausse Histoire est faite de petites anecdotes probablement plus vraies ! Au-delà de combiner les genres en un savant dosage et de structurer ses scénarios autour de sujets de société, voire de préoccupations propres, la particularité de Zidrou est de s’attacher à l’ambivalence de ses personnages et à leur donner une réelle épaisseur psychologique. Dès lors, le scénario se construit sur le jeu des divers protagonistes qui deviennent ainsi les acteurs d’un récit riche de leur présence et non les simples victimes d’une fiction qui pourrait s’écrire avec d’autres. Mais tout cela perdrait beaucoup de son relief sans la mise en scène de José Homs et sans son dessin aussi immersif qu’expressif qui confèrent une dynamique toute cinématographique à des planches qui se lisent autant qu’elles se regardent, voire s’admirent.

La grande puanteur clôt superbement ce diptyque tout en donnant quelques clefs qui permettent de mieux entrevoir les liens possibles qui depuis Au commencement était la colère... se tissent entre la capitale anglaise et, aujourd’hui, la banlieue de Duluth dans le Minnesota. À suivre donc avec, il faut bien l’avouer, déjà une certaine forme d’impatience !

Moyenne des chroniqueurs
8.0