Le passeur de lagunes Le Passeur de lagunes

V enise est devenue un ghetto. Mais pour qui connaît la lagune, il est toujours possible de s’adonner à tous les commerces…

La Sérénissime est souvent fantasmée par ceux et celles qui n’y mettront les pieds que le temps d’une escale. Toutefois, dans le concert des louanges convenues, quelques anges déchus ne sont pas à l’unisson, tels Paolo Bacilieri avec Jours tranquilles à Venise ou Darko Macan et Danijel Zezelj avec La mort dans les yeux ! Christophe Dabitch et Pero Macola sont aussi de ceux-là !

Il est aisé de se perdre dans les brouillards de ces marécages aux mille variations. Paolo pensait en connaître chaque ghebbo, chaque bricola secrètement marquée… La disparition de son père l’amène à aller toujours plus loin dans les bareme et à abandonner les promenades de l’enfance pour mieux s’enfoncer dans les méandres de l’âge adulte.

Loin des clichés réducteurs, Le passeur de lagunes s’attarde sur l’âpreté de la vie dans une ville sans avenir, sur la misère qui accable ceux qui n’ont rien ou alors si peu. Mais c’est également l’histoire d’un parcours initiatique qui permettra, à l’enfant que Paolo n’est déjà plus, de choisir l’homme qu’il sera. Le tout est raconté simplement, sans concession ni atermoiements, mais avec une lucidité qui ne laisse que peu d’espoir quant au dénouement à venir. Pour illustrer cet album, Piero Macola s’attache, lui aussi, plus aux ambiances et à la lumière qu’à la matérialité d’une Venise en décomposition sociale. Ces planches font joliment écho à la simplicité et à la dureté du scénario de Christophe Dabitch.

Le passeur de lagunes est une métaphore dystopique, sans illusions, des rêves perdus de l’adolescence. À lire...

Moyenne des chroniqueurs
7.5