Au nom du fils - Dans l'enfer de la prison de San Pedro

A llongé sur son canapé, une bouteille d'alcool à la main, Stéphane Vernot n'en croit pas ses oreilles. Pourtant, l'homme au bout du fil semble sérieux : son fils Max, avec qui il est en froid depuis des années, est mort dans une prison de Bolivie. Que faisait-il là-bas ? Et pourquoi avoir demandé à ce que son père soit prévenu de son décès ? Pour trouver des réponses à ces questions et à toutes les autres, Stéphane n'hésite pas longtemps...

Pour son entrée en bande dessinée, Pauline Djian s'est entourée de son père, scénariste chevronné (Le Grand Mort, Les Quatre de Baker Street) et d'un de ses complices, l'artiste Sébastien Corbet (avec qui ils ont réalisé notamment La Chenue et L'enfant nu). Ensemble, le trio a imaginé une (en)quête, à l'autre bout du monde, surprenante par bien des aspects.

Le personnage principal tout d'abord. Seul, désabusé, porté sur la boisson, il semble à l'image des premières pages au camaïeu de bleu et gris : terne. Pourtant, devant la nouvelle qui le frappe, son attitude change du tout au tout et il se lance dans un voyage insensé avec une idée qui l'est encore plus

Le cadre ensuite, cette prison incroyable, autogérée, sans surveillant, où la famille des détenus peut entrer et sortir et qui ressemble à un village autarcique avec ses commerces, ses élections et ses lois. C'est donc dans cet univers carcéral particulier que les scénaristes mènent un thriller haletant où le danger est constant. La recherche du père tourne à l'obsession, jusqu'à faire fi des risques qu'il encourt.

Malgré quelques aspects, de temporalité notamment, qui demandent de bien vouloir entretenir une dose d'incrédulité certaine, l'ensemble s'avère prenant, haletant. Les ambiances oppressantes sont parfaitement rendues par le trait charbonneux du dessinateur et sa colorisation (à laquelle Éric Le Pape participe). Une belle brochette de personnages secondaires, des rebondissements, de la violence mais aussi des interactions intéressantes portées par des dialogues bien écrits rendent la lecture des près de cent-trente planches convaincante, tout comme celle du dénouement, ni trop noir ni trop heureux.

Au nom du fils - Dans l'enfer de la prison de San Pedro vaut le détour autant pour son décor que pour son intrigue. Un album réussi en somme, qui marque l'entrée dans le neuvième art d'une autrice à suivre.

Moyenne des chroniqueurs
7.0