Omula et Rema 1. La fin d'un monde

D ans un espace-temps indéterminés, une civilisation humaine est parvenue à vaincre la pollution, les maladies et les guerres. Elle se nourrit de pilules nutritives et des robots effectuent tous les travaux pénibles. Mais le Président Iavis constate un accroissement préoccupant de la population. Le moment est venu de préparer la colonisation d’un nouvel environnement, comme autrefois, il y a plus de quatre milliards d’années, quand les anciens avaient dû fuir Ertha, menacée par la météorite Théia. L’architecte Lancel est désigné pour participer à une des six missions d’exploration. Il partira avec son épouse et sa fille Omula, enfant de neuf ans à haut potentiel intellectuel, qui s’ennuie à l’école et rêve de construire des maisons avec son père. Ailleurs, à Albalonga, le vieux roi Procas, sentant la mort venir, organise sa succession. C’est son fils aîné, Numitor, qui régnera, ce qui n’est pas du goût de tout le monde, à commencer par celui d’Amulius son frère. Un complot se prépare déjà. Dans l’espace, la sérénité du voyage qui emmène Omula vers la planète que ses ancêtres ont autrefois quittée, afin de voir si elle est à nouveau habitable, est bouleversée par une altération des organismes des voyageurs, due à un virus. Seule Omula est épargnée, grâce au régime alimentaire spécial dont elle bénéficie. Elle se retrouve bientôt seule, avec pour unique compagnie celle de son « substitut ».

Yves Sente (Blake et Mortimer, XIII, Thorgal) se lance avec le diptyque Omula et Rema dans une de ces narrations audacieuses qui provoquent la rencontre de deux univers, que tout oppose. Il s’agit ici, d’une part, d’une humanité qui domine presque la nature sous toutes ses formes mais qui doit faire face à une menace de surpopulation et, d’autre part, d’un royaume antique, entre le rayonnement grec et le futur empire romain. Nul besoin d’être particulièrement perspicace pour reconnaître, dès le titre, l’allusion à la fondation de Rome. S’appuyant sur les récits des historiens romains, dont Tite-Live, constitués davantage de légendes que de faits prouvés, il donne une version particulièrement personnelle et imaginative du mythe de Romulus et Remus. C’est Cyann (François Bourgeon) qui débarque chez Alix (Jacques Martin) et Murena (Dufaux et Delaby). La partie futuriste est particulièrement accrocheuse, avec des inventions civilisationnelles et scientifiques riches en potentiel narratif. Le versant préromain est moins original, plus convenu, entre soif de pouvoir, guerres intestines, assassinats multiples et secrets mal gardés.

Malgré tout, Yves Sente s’y entend à construire des personnages consistants, à tisser une intrigue prenante et à harponner son lecteur. Jorge Miguel (Z comme zombies, Les Décastés d’Orion) donne vie à cette aventure par un trait simple, classique et réaliste, qui ne sera pas pris en défaut. Les amateurs de science-fiction et de récits historiques, s’ils ne sont pas gênés par la rencontre des genres, y trouveront leur compte. Il reste à patienter jusqu’à la parution du second volet.

Moyenne des chroniqueurs
6.5