Les grimaciers
N
aples, 1993, Luigi vend des santons dans une boutique et ne roule pas sur l’or. Dans cette ville où politiciens et policiers sont de mèche avec la mafia, il constate les extorsions dont souffrent les petits commerçants de son quartier. Il décide alors de passer à l’action. Comédien raté, il enfile un costume d’Arlequin pour chasser les vilains. Pour l’assister dans sa quête, il reprend contact avec Nunzia, une ancienne flamme. Trois autres lointains amis s’ajoutent et forment une troupe de justiciers masqués.
Pour scénariser les aventures de ces redresseurs de torts, Cheero Deemartsio emprunte le canevas du comic et les clichés de ses héros autoproclamés. Se pose alors l’inévitable dilemme : à quel moment celui qui écrit son propre code de loi devient-il bandit ? Ses intentions peuvent se révéler nobles, elles n’en sont pas moins un pied de nez à la démocratie.
Le véritable propos des Grimaciers apparaît toutefois ailleurs. L’histoire est fondamentalement celle d’une crise de la quarantaine, celle d’un homme cherchant à renouer avec son passé, ses amours et ses rêves de comédie. Il n’a pas su monter sur scène ? Peu importe, la ville entière sera son théâtre et des milliers de personnes l’applaudiront. Voilà une belle revanche sur une vie qui ne l’a pas gâté. Certes, il y a des dommages collatéraux, telles qu'une épouse abandonnée et une gamine délaissée par son père.
Le scénariste pose un regard tendre sur son quintette de bras cassés. Pleins de bonne volonté, mais maladroits, ils n’arriveront jamais à échapper à leur destin de gagne-petit.
Luca Albanese porte le projet avec un trait semi-caricatural relevant plus de l’esquisse que du dessin véritablement abouti. Pour tout dire, l’ensemble demeure un peu brouillon, sans que cela ne soit désagréable. Ses personnages, très expressifs, traduisent du reste l’esprit de la commedia dell’arte. Enfin, la colorisation, un peu glauque et crado, donne le ton au récit.
Une aventure touchante, un scénario bien construit, un début prometteur pour des nouveaux venus dans le neuvième Art.
7.0
