Luminary 3. The No War Man

L e procès de Gabriel King a débuté. Le leader de la Black Libération Army est accusé d’avoir organisé l’attentat dit de la clinique polytraumatique, qui a coûté la vie à des centaines de New-yorkais. Le pays tout entier est fracturé alors que le président Jimmy Carter a été assassiné et qu’une étrange créature de lumière a été aperçue dans le ciel. À peine installée, la nouvelle administration (en étroite collaboration avec les forces militaires) est décidée à mettre un terme à l’agitation ambiante, pour mieux servir ses intérêts. De gré ou de force, et quitte à instrumentaliser la justice pour faire un exemple.

Quelle est la recette des bonnes histoires de super-héros, celles qui marquent durablement le lecteur et seront lues, puis relues, en révélant à chaque fois une nouvelle facette ? Un personnage avec des capacités hors-normes et à la vie en partie chaotique ? Évidemment. Un-e adversaire à sa mesure ? Naturellement. En creux, des réflexions plus profondes ou une critique de la société ? Sans aucun doute ! La série Luminary, servie par Luc Brunschwig (Urban, Les frères Rubinstein) au scénario et Stéphane Perger (Brûlez Moscou) au dessin, coche une à une toutes les cases.

Né bossu, rejeté par sa famille et moqué, Darby McKinley a subi un programme gouvernemental ultra-secret qui a fait de lui un être de lumière, un condensé d’énergie équivalent à une bombe nucléaire (pas besoin, pour cela, de porter un super-slip…). À la fois très puissant et bourré de failles, Darby est vraiment de ces héros attachants. Il n’est pas tout seul dans le camp des « gentils », puisqu’il va croiser la route de Billy, un jeune garçon noir capable de communiquer avec les animaux et de les utiliser comme alliés. Si les pouvoirs du premier cité sont au cœur de l’intrigue depuis le premier tome, le don de Billy prend toute sa mesure dans ce tome final. Différents mais complémentaires, les deux personnages partagent de devoir lutter contre l’opinion publique, loin d’être acquise à leur cause.

Face à eux, il y a notamment Mila. Disposant des mêmes facultés (et des mêmes faiblesses), mais ayant fait d'autres choix, elle incarne à merveille une forme de miroir sombre. Dans le respect des classiques du genre, c’est l’occasion pour les auteurs de mettre en scène une opposition franche et violente, chargée d’émotion et sublimée par des planches d’une épatante intensité graphique. Mais ce troisième tome donne également (dès son ouverture) une importance toute particulière à Ramsey, le demi-frère de Darby. Astucieusement et avec une ambivalence presque malsaine, celui-ci se révèle être très intéressant et ouvre de nouveaux champs de compréhension.

Surtout, tout au long des trois tomes, le scénariste a su intelligemment inscrire l’ensemble dans un contexte contemporain. Bien ancrée dans les difficultés archi-actuelles rencontrées par beaucoup de sociétés occidentales, sur fond d’inégalités (et d’affrontements…) sociales et raciales, l’histoire n’en est que plus passionnante. Elle interpelle le lecteur, ose pointer du doigt certains maux, mais ne tombe jamais dans la simplicité ou la caricature.

Clap de fin, chapeau les artistes ! Avec The no war man, le duo Brunschwig / Perger referme avec maestria sa série hommage à Photonik. Les lecteurs qui ont suivi cette aventure ont droit à une conclusion, ouverte juste ce qu’il faut pour permettre une éventuelle suite. Un jour, peut-être ?

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Lire la chronique du tome 1 (Canicule) et la chronique du tome 2 (Black Power).

Moyenne des chroniqueurs
7.5