Shi (Zidrou/Homs) 5. Black Friday

D epuis les bas-fonds londoniens, la colère des Angry Mothers se propage progressivement à toute l’Angleterre. Mais que peut la fureur de ces mères alors que la première d’entre elles, en bonne poule pondeuse et gardienne des valeurs de l’Empire, rêve de réduire au silence cette populace de basse engeance ?

Dans le Londres victorien, Zidrou réinvente la lutte des classes en la teintant d’orientalisme, de fantastique et de yōkai

La constance est un art difficile et rares sont les séries qui, sur la durée, savent se préserver, à défaut de se renouveler… Pour l’heure, Shi domine parfaitement son sujet et il est à espérer qu’il en soit ainsi tout au long de ce nouveau cycle… annoncé sous la forme d‘un diptyque ! Quoi qu’il en soit, force est de constater que sur ce dernier opus, le scénariste belge fait état, sans faire étalage, de tout son art. Jonglant avec les temporalités et les lieux sans pour autant se disperser, il donne sens et consistance à cette fiction tout comme il en renforce singulièrement la puissance en la plongeant dans un cadre réaliste autant qu’historique. Pour peu de se laisser aller, Black Friday pourrait rimer, toute proportion gardée, avec Bloody Sunday. Cependant, le magnétisme qui se dégage de ce cinquième volume, comme des autres d’ailleurs, doit aussi beaucoup au dessin et à la couleur de Homs. Le dessinateur espagnol atteint ici une forme de maîtrise, pour ne pas dire de maturité, tant sur la physionomie des protagonistes ou la qualité des décors lorsqu'il est question de parler d’esthétique que dans l’agencement interne et les angles de vue pour ce qui relève de l’architecture ou de la dynamique de ses planches.

Avec Black Friday, les évènements s’enchaînent avec une fluidité qui maintient le lecteur en haleine jusqu’à la dernière page ; désormais, le dénouement semble tenir plus du jeu d’échecs que de la partie de go ! Gageons seulement que les nombreuses interrogations demeurées en suspens trouveront, à la lecture prochaine de La grande puanteur, quelques réponses...

Moyenne des chroniqueurs
7.8