L'Échelle de Richter

H assan est cuistot, au black, au Magenta, un hôtel comme un autre de la Capitale. Laurent, lui, est flic et s'occupe de sa mère, qui perd la boule. Ruben vend de l'électroménager pour faire vivre sa famille, en repensant à sa carrière de avortée rappeur. J.O. trafique à droite à gauche en se servant de sa baraque à crêpes pour maquiller tout ça. Karl, croupier, va perdre sa fille et retrouver son ex. Dany est médecin et trompe sa femme en oubliant de regarder son fils grandir. Noémie aspire à être actrice hélas elle a du mal à percer et prend tous les rôles qui lui sont proposés. Toutes ces vies vont s'entrechoquer...

Et tout commence par un meurtre, celui d'une jeune femme. Le scénario imaginé par Raphaël Frydman débute ainsi de manière bien énigmatique. Au lieu de dérouler une enquête classique, l'auteur - pour qui c'est la première incursion dans le neuvième art - construit son récit en se focalisant sur un personnage à chaque chapitre. Le procédé rappellera aux bédéphiles averti(e)s celui de la série RIP mais ici, il est centré sur un évènement déclencheur et les évènements décrits tournent autour. Initialement prévue sur écran, cette intrigue sombre et noire a été murie et a évolué pour être finalement racontée en bande-dessinée.

La partie graphique est l'œuvre de Luc Desportes, formé aux storyboards au côté de Jean-Pierre Jeunet ou Cédric Klapisch. Sous ses crayons, la narration adopte un style dépouillé avec un dessin noir et blanc et une mise en scène déstructurée qui s'affranchit des cases. Pourtant, tout reste fluide et lisible et, au gré des sept chapitres qui composent cette histoire, les éléments se mettent en place, tandis que certaines actions se font écho et que les questions qui se posent trouvent leurs réponses. Si le principe n'est pas nouveau, il est ici parfaitement exécuté et tient en haleine tout du long. Suivre ses vies fracassées qui subissent les déflagrations plus ou moins violentes issues du crime initial devient totalement prenant, malgré quelques facilités scénaristiques.

Enquête sous forme de kaléidoscope, L'échelle de Richter saisit au point de ne plus en lâcher sa lecture avant d'avoir eu le fin mot de l'histoire. Tenir en haleine sur près de cinq cents pages, c'est déjà une réussite. Le faire aussi bien, pour une première BD qui plus est, c'est suffisamment rare pour être salué.

Moyenne des chroniqueurs
7.0