Derrière la colline

P ierre Langlois, un octogénaire, n'est plus en mesure de se débrouiller seul. Placé en maison de retraite, son temps il le passe entre la salle de télévision et sa chambre à écouter inlassablement du Joe Dassin. Le courrier qu'il reçoit un jour, signé par une certaine Flavie, l'invite à se rendre « derrière la colline » pour, comme il est inscrit dessus, « se souvenir de nous ». Intrigué, il décide de fuguer pour partir à la recherche de cet endroit et ainsi honorer ce mystérieux rendez-vous.

Mikaël Mignet, dont c'est la première bande dessinée, s'engouffre avec brio dans un sujet délicat. Parce qu'il est véritablement grave et qu'il touche considérablement de personnes, l'auteur se devait de le traiter avec toute l'authenticité et la sensibilité qu'il représente. Chose faite, car le propos - sans le divulguer - oscille constamment entre l'amour et la colère, suscitant simultanément le dévouement puis, et a contrario, la résignation des proches. Le road trip de l'aïeul, qui aurait manifestement mérité quelques embûches et déconvenues supplémentaires, est parsemé de petits flashs-back temporels qui faciliteront la compréhension des rouages familiaux ainsi que les réactions bien différentes des protagonistes.

Le trait d'Ulric (Tracer, Farpaitement) supplée le peu de texte et d'échanges. Certes grossièrement caricatural sur les silhouettes, le coup de crayon parvient néanmoins à renvoyer avec précision la nostalgie qui se dégage de ses personnages et de ce que sont devenues leurs existences. Âges avancés et pathologies pour certains, humeurs pour d'autres, en observant les faciès, le lecteur, qui devient le témoin du drame qui se joue devant lui, prendra conscience de l'affection, de la détresse et de la colère qui les habitent.

Vite lu, ce one-shot livre un témoignage émouvant sur les terribles conséquences d'une maladie incurable et dont les répercussions sont principalement visibles au delà du patient lui-même.

Moyenne des chroniqueurs
6.0