Cutshin Creek

M algré le mauvais état de la piste, Kathryn n'hésite pas à faire sa tournée sur Cutshin Creek. Sa tâche ? Faire la lecture, proposer ainsi de belles histoires aux mineurs illettrés du Kentucky et leur apporter un peu de culture. Pourtant, lorsqu'elle arrive à la cabane des Trivette, l'accueil est hostile : les trois frères sont revenus chez leur mère après un séjour en prison et ils montrent ouvertement leur désapprobation devant la jeune femme, cette étrangère…

Séverine Gauthier a choisi pour son nouveau one-shot un cadre précis : un petit état des USA, touché de plein fouet par la Grande Dépression de 1930. Elle met en scène une héroïne originale qui a réellement existé, une booklady. Cette bibliothécaire, mandatée lors du Pack horse Library projet du New Deal de 1936, parcourait de nombreux kilomètres à cheval pour délivrer du savoir à une population qui en était relativement dépourvue. À partir de ce fait méconnu, la scénariste bâtit avec habileté une intrigue simple et très efficace, dans une ambiance noire et violente, digne d'un bon western. La brutalité et la mentalité rustre de la fratrie, le courage de la jeune femme et de ses alliés, ainsi que la bonne gestion du suspense rendent la lecture captivante. Le cadet au comportement imprévisible permet d'amener une dimension trouble bienvenue dans une histoire qui aurait pu être cousue de fil blanc.

Après Virginia, Benoit Blary retrouve sa comparse dans une partition aux tonalités venues de l'Ouest sauvage. Son trait fin et détaillé certes, mais relativement brut dans son mouvement, donne un rendu assez particulier qui se retrouve dans le dessin de Jef, très reconnaissable : un aspect rugueux, presque grossier parfois, avec des visages très expressifs. Le travail à l'aquarelle apporte une jolie transparence et les couleurs naturelles sont parfaitement adaptées aux nombreux décors de forêt. L'atmosphère tendue et lourde est parfaitement retranscrite.

Aventurez vous à Cutshin Creek et passez un vrai bon moment en vous plongeant dans ce récit sombre et haletant.

Moyenne des chroniqueurs
7.0