La mort est dans le pré

L e lieutenant Pichard de la police judiciaire de Paris profite de ses paisibles vacances à Plougueven. Lorsqu’un matin, au petit-déjeuner, il est dérangé par Tugdual, un agriculteur. « Ces gens-là ignorent totalement le caractère sacré des congés payés ». Le paysan finistérien lui demande de l’accompagner sur son champ où il y a fait la découverte d’un corps. Le macchabée serait un joggeur en bottes de caoutchouc. Quel affreux mystère pourrait pousser un trentenaire à faire de la course à pied vêtu de la sorte. Ah, ces ploucs de Bretons, n’ont-ils donc aucun amour-propre ?

Directeur de la collection Pataquès, James en est également l’un des principaux contributeurs. Il a réalisé en tant qu’auteur complet La vérité nue et La sémantique est élastique. Par la suite, il a scénarisé les trois volumes de Rob pour son acolyte, Boris Mirroir. Prolixe, s’il en est, le public a le plaisir de le retrouver aux manettes des aventures de la commissaire Linguine et de son adjoint Pichard, dont le second opus s’attaque à la Breizh attitude. Cette enquête se révèle du même tonneau que celle développée dans Meurtre à la compta. Ainsi, vous constaterez que les agents ne brillent ni par leur savoir-faire, ni par leur intelligence. Les investigations ne sont que prétextes à l’humour léger, climatique et éthylique. Les lieux communs de la culture armoricaine sont souvent imposés aux forceps manquant, par moments, leurs chutes – peu aidé, il est vrai, par la contrainte du continuum narratif. Mais pour autant, la lecture est agréable. Sans lourdeur, l’écrivain intègre sa vision acerbe du capitalisme. Et il conjugue son propos avec un message « écolo » qui rappelle que la péninsule celte souffre des algues vertes et de la concurrence du cidre normand !

David de Thuin anime le tandem d’un dessin jeté aux gestes tremblotant. Hormis quelques fantaisies de mise en page (de simples averses de composition), l’illustrateur se cantonne à un gaufrier de quatre cases. Cette structure stricte s’accommode parfaitement du rythme des gags et du format réduit de l’album. L’artiste belge épure son décorum afin de renforcer les effets de manches et les bons mots du dialoguiste. Le créateur de Waldor et de Le Roi des Bourdons use, par ailleurs, d’une colorisation simple par aplat. Il apporte au surplus des pigments à divers phylactères. Puis, ponctuellement, il produit une bichromie à la manière de Morris - une première teinte destinée aux personnages, une deuxième pour le fond de la vignette. Bref, efficace à défaut d’être esthétique.

Pluie, chauvinisme exacerbé, crachin, omerta, re-crachin et autres clichés régionaux servent de fondement à La mort est dans le pré. Un polar à déguster avec du second degré, un bon kouign-amann et un verre de lambig !

Moyenne des chroniqueurs
6.0