Le spectateur

D ès sa naissance, quelque chose cloche avec Samuel. Il ne crie pas. Enfant, adolescent, il ne parle pas non plus. Pourtant, ses cordes vocales semblent fonctionner parfaitement selon des examens médicaux effectués durant son enfance. Lui préfère contempler son monde comme un simple spectateur malgré l'incompréhension la plus totale de ses parents. Sa grande passion : dessiner.

Théo Grosjean (L'homme le plus flippé du monde) propose un récit sombre teinté de cynisme et saupoudré d'humour noir. L'auteur souhaite faire passer le lecteur par plusieurs sentiments à l'égard de son héros, tout au long de l'histoire. La tristesse : Samuel ne sera pas épargné par des évènements bouleversants et traumatisants. L'empathie : cet être qui s'avère si fragile et absent mais pourtant tellement attachant dans sa façon de se mouvoir et de se débattre au gré de son existence. À noter qu'il n'est jamais en interaction avec les autres personnages ce qui accentue un sentiment d'isolement. Les thèmes principalement abordés seront les relations familiales, le handicap et l'acceptation des différences, des sujets actuels dans nos sociétés contemporaines.

Pour rendre ce personnage « transparent » et insaisissable en ne voyant que très rarement sa tête seulement par le biais d'un miroir ou grâce à des reflets de flaques d'eau, le scénariste choisit d’offrir une vision subjective digne des jeux vidéos tel que le mode First Personnal-Shooter pour vivre pleinement l'immersion de son protagoniste.

Côté dessin, Théo Grosjean utilise une bichromie bleu-vert et noire qui accroît le côté froid et pessimiste du scénario. Un découpage dynamique de six cases par page fluidifie l'album et donne un petit côté comics indépendant américain. Dès l'ouverture de l'album apparaît un message en relief qui fera réfléchir en refermant ce roman graphique.

Au bout du compte, cette narration percutante et d'une grande densité ne laissera pas indifférent, elle invite même à tout à chacun de se libérer de ses propres émotions qui peuvent rester muettes. Le spectateur rappelle combien il est important d'être l'acteur de sa propre vie !

Moyenne des chroniqueurs
7.0