Toutes les fois où je me suis dit... je suis gay !

E leonore Crewes est gay. Elle l'a toujours été, mais elle a mis du temps à le comprendre. Gamine, elle était fan absolue de Willow Rosenberg, un personnage de Buffy contre les vampires, qui fit son coming out lors de la quatrième saison de la série. En grandissant, elle devint une adolescente comme beaucoup d'autres. Elle n'était pas particulièrement à l'aise en société, mais heureuse. Elle ne faisait pas partie des élèves populaires auxquels tous aspirent à ressembler. Arrivée au collège, elle restait une fille banale, qui cherche à saisir pourquoi elle n'arrivait malgré tout pas à se conformer au moule hétéronormatif dans lequel elle baigne. Les garçons ne l'intéressaient pas et les quelques flirts qu'elle entamait se terminaient vite, pour des raisons aussi rédhibitoires que futiles, comme le port de chaussettes avec des tongs. Ellie avait l'intuition qu'elle n'était pas tout-à-fait elle-même, mais elle évitait soigneusement tout questionnement sur ses affinités sexuelles. Puis elle fit son coming out. C'était le premier janvier 2014, devant ses meilleures amies et après pas mal d'alcool. Quelques heures plus tard, elle opéra un discret coming in... Une amnésie d'autant plus incompréhensible qu'elle n'avait reçu que des encouragements de ses copines. Elle n'était pas prête. Comme elle ne le sera pas plus lors de sa deuxième tentative, ni des suivantes.

Dans ce récit autobiographique, l'autrice raconte avec légèreté la difficulté d'accepter qui elle est. Sortir du placard était extrêmement compliqué pour elle parce qu'elle n'avait pas conscience d'y être. Il n'est donc pas question de la peur du jugement des autres ou de l'homophobie qui empêche certains de s'affirmer. Au contraire, elle a toujours bénéficié d'un environnement bienveillant et tolérant. Son cheminement est avant tout personnel et intime.

Toutes les fois où je me suis dit... je suis gay n'est pas un manifeste. Ce n'est pas non plus un mode d'emploi sur la meilleure manière d'annoncer son homosexualité à ses proches et à soi-même. Il s'agit plutôt de la construction progressive de l'identité d'une jeune femme qui se trouve être lesbienne. Avec simplicité, elle se raconte à travers des scènes de vie plutôt banales, portées par un graphisme sans artifices et aux décors à peine suggérés. Au final, le résultat est une bande dessinée optimiste qui se lit comme un journal intime. Il n'y a ni pathos, ni drame. S'il est facile d'éprouver de la sympathie pour la narratrice, et si le lecteur est sans doute content de voir qu'elle a finalement trouvé sa voie et semble heureuse, cet album se révèle bien inoffensif et sans trop d'intérêt.

Moyenne des chroniqueurs
5.0