L'entaille

A u sein d’une petite ville des États-Unis, un tueur en série sévit avec une batte de baseball comme arme de prédilection. Cette succession de meurtres débute un soir, lorsqu’après une soirée étudiante arrosée, deux jeunes filles repèrent un homme doté d’une casquette sur le terrain de sport universitaire. Le regard vide et ne répondant pas à leurs gestes amicaux, ce dernier se retourne et commet son crime. La petite commune balnéaire plonge dans l’horreur et l’angoisse. D’où vient cet individu ? Pourquoi ne parle-t-il pas ? Qui sera la prochaine victime ?

Antoine Maillard réalise avec l’Entaille sa première publication dans l’univers de la bande dessinée aux éditions Cornélius. Le travail sur cet album a débuté en 2012 avec pour idée maîtresse de créer un récit dans les codes du slasher-movie. Ce sous-genre cinématographique de l’horreur auquel l'histoire s'apparente, a reçu ses lettres de noblesses à la fin du siècle dernier avec des titres célèbres comme Halloween de John Carpenter, la saga Scream de Wes Craven et Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hopper. L'intrigue de base est linéaire car il est généralement question de suivre les péripéties d'une bande d’adolescents qui se feront assassiner les uns après les autres par un serial-killer, chacun se demandant quand viendra son tour. Ici, le scénariste propose une trame plus complexe en ajoutant Daniel, personnage discret, mais ayant de plus en plus de troubles psychiques et de pulsions morbides. Le principal danger de la bourgade américaine est-il réellement celui mis sous les projecteurs des chaînes d'informations ou se cache t-il dans l'ombre du criminel recherché ?

Également dessinateur, Antoine Maillard propose des illustrations réalistes au crayon de bois, en utilisant des dégradés de gris saisissants. Les expressions des visages sont parfaitement exécutées afin d'illustrer la détresse et la panique lorsque le batteur fou apparaît. Un léger bémol subsiste quand le regard se porte sur la magnifique couverture dotée de tons pastels. Et si cette histoire avait été réalisée en couleurs, l’immersion en serait-elle meilleure pour le lecteur ? Il est légitime de se poser la question après la réussite de projets colorisés pour le New-York Times et des festivals (cinéma, bandes-dessinées). Par ailleurs, il est possible de consulter sur internet (Slash them all) les travaux préliminaires de l’auteur sur cet ouvrage achevé dix ans plus tard. En prime, vous découvrirez des planches inédites qui n'ont pas été retenues, une bonne raison pour admirer un peu plus longtemps ce sublime graphisme.

Un scénario percutant et un dessin envoutant sont les ingrédients incontournables pour transformer un premier essai en un véritable coup de maître ! Pour finir, il faut décerner une mention spéciale à l’éditeur qui réussit avec brio une fabrication particulièrement soignée.

Conseil de lecture complémentaire : Slasher par Charles Forsman.

Moyenne des chroniqueurs
7.3