Chaplin 2. Prince d'Hollywood

J uillet 1919, tout va bien pour Charlie Chaplin. Marié à Mildred depuis quelques mois, il a créé la United Artists avec trois amis et collègues, Mary Pickford, Douglas Fairbanks, D.W. Griffith en début d'année, pour s'émanciper des studios. Mais alors qu'il s'apprête à devenir père pour la première fois, le couple perd l'enfant. Si ce drame les plonge dans le désarroi, il ne tarit pas l'imagination du réalisateur qui, grâce au soutien de son frère Syd, met sur les rails son prochain projet The Kid. Malheureusement, le succès du film est accompagné d'une nouvelle épreuve : son divorce. Le premier... La légende est en marche.

Après en Amérique, entrée en matière réussie sortie il y a moins de dix-huit mois, le deuxième opus de la trilogie Chaplin vient orner les étals des librairies. Laurent Seksik s'attache à la période effervescente pour le cinéaste, entre créativité débridée, indépendance financière - et donc artistique - et vie amoureuse mouvementée. Sur environ douze années, la quantité des événements mis en avant est dense mais leurs enchaînements sont, dans l'ensemble, fluides. Contés de manière chronologique, ils mettent en avant plusieurs éléments de la personnalité de la star. Son obstination à écrire et filmer, sa grande confiance en lui - parfois trop, comme lors de l'émergence du « parlant » -, sa relation avec son frère, le regret que l'état de leur mère crée, toutes les étapes qui émaillent sa carrière comme sa vie sont ainsi narrées et ajoutent de la profondeur au mythe.

Si la lecture est aisée, le mérite en revient certainement à David François. Dans son style caractéristique, le dessinateur rend palpables les changements d'humeur de leur héros et restitue la démesure de certains plateaux de tournage. Ses constructions, lors des nombreuses scènes de discussions de Charlie (avec sa mère, ses femmes, Syd ou les avocats), appuie sur l'importance des jeux de regards comme des silences. Grâce à ses choix de mises en page ou ses variations de colorisation, il marque chaque séquence d'une ambiance particulière qui accompagne judicieusement le propos. Enfin, son trait, toujours dynamique, sert le rythme sans effet superflu.

Prince d'Hollywood est une confirmation. À la fois du soin apporté par Laurent Seksik et David François pour être à la hauteur de leur sujet comme de la qualité d'une histoire riche, romanesque et pourtant réelle. Il ne reste plus qu'un acte pour conclure en beauté, vivement !

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Moyenne des chroniqueurs
7.0