Le plongeon Le Plongeon
Y
vonne Lhermitte, quatre-vingt printemps et peut être quelques dents en moins, décide qu’il est temps de vendre sa maison. Elle déménage une dernière fois pour s'installer dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Toujours alerte et lucide, elle souhaite ne pas être un poids pour ses enfants et petits-enfants et se résout également à euthanasier Bellouche sa vieille chienne avant de « plonger » dans les dernières années qui lui restent à vivre. Yvonne doit maintenant se contraindre au respect d'instructions possiblement absurdes, dictées par un règlement intérieur rédigé par une directrice stricte et infantilisante, mais également essayer de rompre sa solitude en nouant de nouvelles amitiés avec les résident(e)s de son ultime lieu d'existence : Les Mimosas.
Séverine Vidal narre une histoire sur la fin de vie en EHPAD, sujet important de notre société actuelle où l’espérance de vie s'accroît d'année en année grâce aux différents progrès (médecine, alimentation, éducation…). L’autrice dépeint des moments ordinaires en collectivité comme les repas, les ateliers récréatifs, les dernières histoires d’amour, mais aussi la déchéance inévitable des pensionnaires. Les témoignages recueillis pour l’élaboration du scénario apportent sincérité, justesse et émotions qui peuvent être bouleversantes pour des individus qui ont été ou sont aujourd’hui confrontées à ce dilemme du placement d’un membre de sa famille en structure médicalisée.
Cet ouvrage qui se veut descriptif et pragmatique doit également beaucoup à Victor L. Pinel qui s’attache à dessiner avec réalisme les personnes âgées. Sans concession, le regard qu'il pose sur la vieillesse se révèle bienveillant et saupoudré de pudeur. Les corps dénudés sont réalistes et dépourvus de voyeurisme; un dégradé de bleu vient habiller et colorer plusieurs scènes journalières du récit. Pour finir, les pages sans dialogues méritent une mention spéciale, car elles appellent à la réflexion sur la condition de vie de nos aînés.
La place du « club du troisième âge » dans la bande dessinée devient plus importante depuis quelques années avec le succès reconnu des aventures trépidantes des Vieux Fourneaux (6 tomes) de Wilfried Lupano et Paul Cauuet chez Dargaud, ou très prochainement Ne M’oublie pas d’Alix Garin à paraître chez le Lombard traitant de la maladie d’Alzheimer. Le Plongeon dresse un tableau de notre civilisation empli d’humanité avec, comme fil conducteur, le bout d’existence aussi petit soit-il qu’il reste à vivre, à croquer à pleines fausses dents !
7.0