L'Âge d'or 2. Volume 2

P lusieurs années se sont écoulées depuis que Tilda a vu sa mère tenter de lui dérober son héritage. Le coffre, et le livre qu'il renferme, désormais entre ses mains, la princesse devenue chef de guerre assiège le château de son frère pour lui reprendre le trône. Tandis que de l'autre côté du royaume, les insurgés menés par Bertil et Hellier s'organisent dans les provinces, Tilda, obnubilée par sa quête, devra s'appuyer sur Tankred et toutes les bonnes volontés pour ne pas sombrer sous le poids de son ambition...

Grandiose, c'est le mot qui vient à l'esprit au moment où les premières pages se dévoilent. Assauts, chevauchées, poursuites, affrontements, tous les ingrédients des grandes batailles sont réunis et explosent, d'emblée, au visage des lecteurs. Roxanne Moreil et Cyril Pedrosa ont décidé d'entrer dans le vif du sujet rapidement et d'en mettre plein la vue tout de suite. Passé le choc, un doute apparaît rapidement ; une ellipse de plusieurs années, qui sépare les évènements des deux opus, désarçonne quelque peu. Si de nombreuses questions (qu'est devenu le coffre (et son contenu) ? Comment Tilda s'est-elle tirée du mauvais pas concluant la première partie ? A-t-elle pardonné à Bertil et que fait ce dernier ?) devront attendre pour, peut-être, trouver une réponse, l'intrigue ne souffre d'aucun temps mort. La trame prend une autre voie et très vite l'histoire happe, tout redevient fluide et la magie opère.

De toutes les pistes lancées dans la première partie, c'est la résolution de l'affrontement fratricide qui occupe l'essentiel de cet album. Et pour en restituer la fureur et la force, les auteurs ne s'économisent pas. Il y a bien sûr ces planches généreuses, en décors, en personnages, en couleurs, en mouvement mais surtout le propos qui sous-tend ce combat apparaît clairement réfléchi. Le pouvoir corrompt, même celles et ceux portés par de bonnes intentions. Être seul(e) à gouverner n'est jamais bon, qu'il s'agisse d'un prince intrigant, entouré d'une cour dodue qui espère récupérer prestement ses terres, ses richesses et ses serfs, ou d'une princesse revancharde, aveuglée par sa soif de justice au point de ne pas voir ses troupes s'épuiser et leur foi dans leur cause s'évanouir. Dans ce chaos, que les teintes vives et pétillantes rendent d'autant plus saisissant, l'ambition dévore et finit par rejaillir jusque sur la peau. Le salut pourrait peut-être venir du peuple, des petites gens - que Poudevigne, Languille et Petit Paul représentent à merveille - à condition toutefois que les puissants prennent le temps de leur prêter l'oreille. Un discours en parfaite résonance avec notre époque en somme...

Cinq ans de travail s'achèvent avec cette seconde partie, cinq années de labeur qui traduisent l'ambition et l'investissement que les auteurs ont mis dans cette œuvre. Qu'ils soient soulagés, le résultat est à la hauteur. Romanesque, engagé, actuelle, divertissant, cette fable médiévale est tout cela à la fois. L'Âge d'Or est aussi, et surtout, une invitation à remettre en question la façon dont le pouvoir s'exerce. Et de rappeler que, quelque soit l'époque, « sous la courbe lente du soleil, l'ombre ne fait que passer ».

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