Pepe Carvalho 2. La Solitude du manager

A ntonio Jaumà, cadre supérieur dans une multinationale espagnole, est retrouvé mort dans un fossé, les fesses à l'air, une culotte de femme dans la poche. L'enquête s'oriente immédiatement vers un règlement de comptes lié à la prostitution. La victime n'avait jamais fait mystère de son goût pour les relations tarifées. Sauf que la veuve n'y croit pas vraiment. Elle fait donc appel à Pepe Carvalho. Pourquoi lui ? Parce que son nom apparaissait dans les papiers de son mari. En effet, les deux hommes se connaissaient. Ils s'étaient croisés quelques fois, dans une autre vie. Très vite, les circonstances du meurtre deviennent de plus en plus suspectes. Les fantômes du franquisme ne sont pas loin.

La solitude du manager est le deuxième tome de l'adaptation des romans de Manuel Vázquez Montalbán. Pepe Carvalho est présenté comme un individu complexe, au passé trouble qui mêle militantisme de gauche et collaboration avec la CIA. Épicurien dans l'âme, il ne refuse jamais un bon repas. Il représente l'archétype du détective sans attaches, flanqué d'un assistant un peu farfelu et entretenant une relation vaguement sentimentale avec une prostituée. Avec cette enquête, les auteurs plongent dans les années suivant la mort de Franco, lorsque le pays connaissait une période trouble, entre soulagement de la fin d'une dictature et tentation pour les élites de ne pas complètement renoncer au monde d'avant, quitte à perpétuer des pratiques discutables.

Le récit s'inscrit clairement dans la tradition de la série noire : le privé qui secoue la fourmilière, les flics pourris, la critique sociale sous-jacente. Le déroulement de l'intrigue, entre flashbacks et révélations, est efficace à défaut d'être original. Au dessin, Bartolomé Seguí est visiblement à l'aise pour recréer l'ambiance de l'Espagne de la fin des années soixante-dix. Ses personnages sont assez bien campés. Le résultat n'est pourtant jamais passionnant. Sans doute est-ce dû à la difficulté de condenser un roman de trois cents pages en septante planches de bande dessinée. Le scénario manque de souffle, insufflant trop d'informations et de protagonistes dans trop peu d'espace. Le peu de familiarité avec le contexte sociologique de l'époque n'aide sans doute pas non plus à s'intéresser à cette enquête. Même si l'ensemble est carré et bien construit, il manque singulièrement d'éclat.

Moyenne des chroniqueurs
5.0