Jeannot

A vant le drame, Jeannot était heureux, entouré de sa fille et de son épouse. Depuis, il a le cœur en miettes et tout l’insupporte. Même les plantes qu’il entretenait avec tant de soin et qu’il brutalise sans ménagement en les retaillant. Pourtant, elles protestent ; il les entend. Désormais retraité, pas question pour lui de raccrocher le sécateur, l’élagage n’attend pas, surtout celui de cet acacia qui s’obstine à pousser. La querelle s’envenime avec l’arbre et un rire fuse. Celui d’une petite vieille assise sur un banc du parc. Le jardinier ronchonne… pour l’instant.

Perdre un enfant est une douleur au-delà du supportable, de l’admissible. Le nouveau héros fatigué de Loïc Clément (Chaque jour Dracula, Le voleur de souhaits) est écrasé par ce poids trop lourd, s’étiolant telle une fleur dont la sève serait tarie. Perpétuellement irrité, il n’en est pas moins touchant, quand il se raconte avec un regard aiguisé par le recul. Avec justesse et talent, le scénariste parvient à rendre palpable la souffrance de cet homme qui exprime sa colère en sciant sans égard, comme lui-même a vu ses fondations s’abattre, sans ménagement. Pourtant, bien que la douleur et l’amertume soient profondes, l’espoir se glisse, par petites touches d’abord, puis s’étoffe et l’emporte finalement, grâce à Josette, la « Chaussette » de l’album du même nom . Le tout est narré sur un ton résolument optimiste et non dénué d’un humour de bon aloi, malgré la gravité du thème.

Le dessin de Carole Maurel accompagne agréablement le récit. Mettant l’accent sur l’expressivité des protagonistes, le trait restitue bien les émotions, permettant de suivre la progressive décrispation du héros. Un soin appréciable est également apporté aux décors, particulièrement à la flore qui ne manque pas de… caractère. Découpées en une à neuf cases et proposant des cadrages variés, les planches sont embellies par une colorisation tout en nuances et texture qui donne joliment corps à cette histoire.

Avec tendresse et poésie, Jeannot propose aux jeunes lecteurs de découvrir comment un autre cœur desséché a pu refleurir. À lire.

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Moyenne des chroniqueurs
6.0