La maison aux souvenirs

L e couple d’Éléonore bat de l’aile ; ayant grandi dans une dynamique familiale complexe, elle a du mal à faire confiance aux hommes. Elle se rend chez son frère, David, qui a racheté la maison de leur enfance. La rencontre est cordiale, même si les deux ne se sont pratiquement pas vus depuis 17 ans, peu après la mystérieuse disparition de leur père. Tout le monde le croit mort, mais l’aîné apprend à la cadette qu’il l’a retrouvé. Cette dernière ne veut toutefois pas en entendre parler. Mais que s’est-il passé ? La réponse viendra de Théo qui a toujours caché à sa mère qu’il avait le pouvoir de capter les souvenirs des gens. Cette étrange prédisposition lui permettra de lever le voile sur un secret de famille.

Le ton est donné dès la première image : deux habitations isolées, dominées par un vieil arbre sombre, gigantesque et menaçant. Voilà pour les apparences. Le lecteur ne le sait pas encore, mais les deux logis sont rattachés par un sous-sol commun, tel un lien invisible. Tout le récit est d’ailleurs sous le signe de la dissimulation, ces non-dits qui entretiennent le doute et la méfiance pour mieux empoisonner la vie. Afin de faire éclater la vérité, Nicolas Delestret propose un scénario en forme d’enquête, à cette différence que les témoins se confient sans en être conscients et que leurs réminiscences ne peuvent mentir. Petit à petit, le préadolescent reconstitue les faits, favorisant ainsi un retour à l’équilibre rompu plusieurs décennies avant les événements, tout en réparant le présent. La révélation finale, sous la forme d’une lettre retrouvée, surprend ; en fait elle ne convainc pas tout à fait.

Les fréquentes évocations d’épisodes passés sont habilement soulignées par des fonds de page noirs, le procédé est malheureusement abandonné dans les dernières planches. Le trait naïf de l’illustrateur concède beaucoup de légèreté à cette histoire fondamentalement tragique. Enfin, les acteurs répondent aux attentes dans ce quasi-huis clos où tout repose sur leur jeu.

Un bon petit drame familial, auquel s’ajoute un soupçon de paranormal qui soutient le propos, sans jamais le dominer.

Moyenne des chroniqueurs
6.5