Puisqu'il faut des hommes Joseph

I l est revenu. Si le cœur de la mère - comme celui de toute mère - se gonfle de joie à la vue du fils, le regard du père s'en détourne. 1961, Joseph revient au pays, la guerre d'Algérie est terminée. Jules, le frère, lui réserve également un accueil des plus cyniques. Pourquoi ces réactions aussi froides ? Il parait que le jeune soldat aurait passé le temps du conflit à l'arrière, un planqué quoi. Y a pas d'honneur ni de gloire dans ces conditions. Peut-être que la vérité est plus complexe que cela. Et Mathilde, l'a t-elle attendu ?

Artiste de plus en plus présent, Philippe Pelaez aime s'attaquer à des genres très différents dans ses séries. Après la S-F de Parallèle, il dépoussière le fantastico-gothique avec Maudit sois-tu ou dynamise le policier humoristique dans Un peu de tarte aux épinards. Il propose ici un one-shot dont le fond s'inscrit dans le difficile contexte de l'histoire militaire française. Les thématiques abordées sont nombreuses, classiques et universelles : le retour à la vie parmi les civils, le regard des autres, le poids des actes, la culpabilité, l'exacerbation des sentiments... À travers cet événement précis, le scénariste évoque finalement les conséquences de tout conflit armé, le propos dépassant le cadre propre à cette confrontation marquante pour élargir la réflexion. Chaque personnages représente l'archétype d'un comportement attendu. Ce petit manque de subtilité engendre un suspense moindre une fois le secret de Joseph dévoilé. Néanmoins, le plaisir est au rendez vous avec ce drame solide et immersif.

Victor L. Pinel (La maison de la plage) propose un graphisme semi-réaliste aux couleurs satinées, très sage. Son trait propre et net génère beaucoup de clarté dans les illustrations et aucune fioriture. Le lecteur peut le voir de deux façons : apprécier le fait d'adoucir le propos de teneur tragique ou regretter l'absence de noirceur inhérente au sujet. Quoi qu'il en soit, la lecture se révèle relativement plaisante et fluide.

Sur un scénario sobre et sérieux, les deux artistes livrent avec Puisqu'il faut des hommes un récit poignant qui, s'il n'apporte pas de regard neuf sur la question, en offre une version qualitative et passionnante.

Moyenne des chroniqueurs
7.0