Mamoht

S rednekolymsk, 2015. En Sibérie, les temps sont durs et la vodka chère. C’est ce qui pousse Alexis à accepter la proposition de son pote Boris : aller prospecter des défenses de mammouths fossiles dans la toundra. Le boulot est difficile, les conditions de vie exécrable et la concurrence virile (pour rester poli), mais la paye est bonne, excellente même. Demain, rendez-vous à l’aube et direction le Nord.

Si la découverte d’un mammouth entier en bon état reste un évènement rare, trouver des squelettes à peu près complets est plus commun. Comme pour les éléphants d’Afrique, c’est l’ivoire de ces mastodontes qui attire les convoitises. Un marché parallèle c’est même mis en place à Hong Kong pour alimenter les amateurs fortunés. Il n’en fallait pas plus pour que des baroudeurs de tout acabits débarquent dans l’Arctique russe sur la piste de cet or blanc. Fiction nourrie par cette réalité, Mamoht se lit tel un western de frontière, les Indiens en moins ou presque. Une impressionnante brochette de grandes gueules, un environnement sans pitié et l’espoir de toucher le pactole, Fabien Grolleau n’a pas eu besoin d’aller bien loin pour imaginer son histoire. Les aficionados de Sergio Leone, John Ford et Werner Herzog se retrouveront immédiatement en terre connue : violence, alcool et folie sont au programme. Servant de fil conducteur, Alexis joue le rôle de Candide dans cette descente en enfer sur fond de pergélisol en fin de vie. Cependant, une fois la situation campée, l’intrigue perd passablement de sa superbe. Les péripéties deviennent un peu trop convenues et les coups de théâtre guère fracassants, tandis que le final s’enlise sans éclat dans un trou d’eau anonyme. Dommage, l’aventure était belle.

Pixel Vengeur sort de sa zone de confort et illustre avec un panache certain cette expédition dramatique. Son style semi-réaliste entre Michel Plessix (période Julien Boisvert) et Fred Simon fait des merveilles, tant pour les protagonistes (jolie galerie de faciès aux pifs traités façon puzzle) que dans la description de la nature sauvage. Le découpage s'avère solide et les nombreux moments chocs sont rendus d’une manière ultra-dynamique. Les couleurs de Delf, peut-être un peu trop douces dans les scènes d’action pure, se montrent néanmoins efficaces. L’utilisation de trames apportant un petit cachet original très agréable aux planches est à relever.

Malgré un cadre étonnant et rarement exploré en BD, Mamoht n’arrive pas à totalement convaincre. Au fil des pages, c’est comme si, en plus du sang des héros, les moustiques avaient pompé une bonne partie de l’énergie créative des auteurs.

Moyenne des chroniqueurs
5.0