Du charme du parking à étages

C ette fois, c’est la vraie dèche. Viré de son boulot, lâché par ses prétendus potes et avec six mois de loyer en retard, Arturo ne voit plus comment il va s’en sortir. Bon, tout n’est pas de la faute des autres, il a certainement le coude un peu trop leste et la patience n'est pas sa première qualité. Purée, que faire ? Accepter l’offre pourrave de cet avocat véreux ? Quand il n’y a plus rien à perdre, même les mauvaises décisions deviennent séduisantes.

Roman noir minimaliste nourri aux peurs sociétales, Du charme du parking à étages est un récit coup de poing dans la gueule. Marino Neri plonge au centre de la psyché d’un des perdants de l’économie et en profite pour dépeindre une Italie côté cour, loin des clichés habituels. Le personnage principal, un homme célibataire d’un âge indéterminé, en bave pour se maintenir à flot. Cet Arturo a un passé sans doute difficile et des rêves comme tout le monde. Ceux-ci ne sont que suggérés, alors qu’il se noie petit-à-petit dans une existence ne lui offrant aucune porte de sortie. C’est là le point fort de la narration, le vrai ennemi, c’est le maintenant. Écrasé par la réalité, le héros n’a aucune échappatoire. Finement construit, ce scénario circulaire ne fait que suivre ces prémices. Résultat, lentement, mais sûrement, le lecteur se retrouve également pris à la gorge devant l’implacable finalité qui se met en place. L’immersion est totale.

Glauque, morose et glaciale, la mise en image l’est tout autant. Le trait typé comics franc et sans concession est associé à un découpage pas moins tendu. Recentrant inlassablement son propos, le dessinateur représente régulièrement la même vue générale de l’ensemble urbain autour duquel se déroulent les événements. Cette astuce graphique renforce le sentiment d’aliénation ressentie par les protagonistes. Ceux-ci, des messieurs et des mesdames tout le monde, sont dépeints dans leur entièreté, sans fard et sous un éclairage cru peu flatteur. Ni-ange, ni-monstre, ils forment un instantané d’une humanité reconnaissable par tous.

Polar, conte fantastique ou réquisitoire politique ? En fait, Du charme du parking à étages va beaucoup plus loin, c’est du réel dont il est question.

Moyenne des chroniqueurs
7.0