Ni vu, ni lu

E ntre un emploi du temps surchargé, l’obligation d’avoir un avis immédiat et de devoir le partager en direct sur les réseaux sociaux, il est devenu quasi impossible de suivre les sorties littéraires et cinématographiques. Et puis, avec la surproduction permanente, les séries télé événements et les préquels des spinoffs, ça fait quand même beaucoup de mauvaises choses à se farder. Mais, voilà, comment éviter de passer pour un inculte lors d’une discussion entre collègues ou amis ?

En 2010, Henrik Lange avait pensé avoir trouvé la solution en publiant 90 livres cultes à l'usage des personnes pressées et 90 films cultes à l'usage des personnes pressées. Comme les titres le suggèrent, l’auteur résumait en une page différents chefs-d’œuvre du répertoire. En vérité, quatre cases, c’était déjà trop. Jean-Christophe Mazurie débarque aujourd’hui avec Ni vu Ni lu, l’ouvrage indispensable pour briller en société et faire éclater sa perspicacité et son intelligence sans avoir à trop s’investir personnellement.

Le recueil regroupe les chroniques d’œuvres plus ou moins populaires que Mazurie a rédigées sans les avoir lues ou vues. Mauvaise foi continuelle, argumentation fallacieuse (plus c’est gros, plus ça passe) et références vaguement à propos forment la base de ses analyses. Le résultat est absolument hilarant sur le fond et implacable dans la manière. En outre, tout le monde a déjà utilisé plus ou moins volontairement un de ces stratagèmes afin de sauver la face, l’identification (et une certaine honte joyeuse) qui en découle rend la lecture piquante à souhait. L'ensemble est habillé par un graphisme alliant modernité et simplicité qui n’est pas sans rappeler le regretté Mix & Remix. Évidemment un peu répétitif en raison de sa construction, Ni vu Ni lu s’appréciera mieux à petites doses pour ne pas faire trop ressortir ses ficelles.

Les amateurs de second degré, de clins d’œil et de pop culture en général trouveront assurément de quoi faire leur bonheur dans cet album rempli d’une sagesse à la fois très relative et universelle. Au pire, pas de besoin de lire, vous direz simplement que c’est très bien.

Moyenne des chroniqueurs
6.0