Jhen 17. Le procès de Gilles de Rais

E n octobre 1440, au château de la Tour Neuve de Nantes, se tient un procès retentissant. Gilles de Rais, maréchal de France, connétable et compagnon d’armes de Jeanne d’Arc, doit répondre aux accusation d’infanticide et de pacte avec le Diable. Ami de Jhen, l’homme est puissant et respecté. Mais une agression qu’il a perpétrée en l’Église de Saint-Étienne-de-la-mer-morte et des rumeurs d’étranges invocations résonnant aux abords de son château de Machecoul ont tôt fait d’attirer sur lui une attention dont il se serait bien passé. Et puis, il y a ces dizaines d’enfants que des parents crédules lui ont confiés, pour leur trouver un travail, et qu’on ne revit jamais. Les faits sont là, mais le seigneur, aidé par quelques complices et effrayé du monstre qui est en lui, n’avoue pas.

Après Alix, Jhen est la deuxième grande série historique initiée par Jacques Martin. Cette fois, c’est la fin du Moyen Âge qui est mise à l’honneur. D’abord baptisé Xan, le personnage fait son apparition dans le Journal de Tintin en 1978. Ses aventures seront publiées en album dès 1984 chez Le Lombard, puis par Casterman sous son nouveau patronyme. Jacques Martin écrira les neuf premiers épisodes et confiera la suite à Hughes Payen, auquel d’autres succéderont. Jean Pleyers en est le dessinateur original. Il mettra en image treize albums. Il est de retour avec Le Procès de Gilles de Rais, après deux aventures confiées à Paul Teng.

Gilles de Rais occupe une place prépondérante dans la fresque. Il est au cœur de la trilogie L’œil de la mort, Jehanne de France et Barbe-Bleue. Jacques Martin, qui n’a pu épuiser le potentiel narratif du personnage ni mettre en scène la fin de sa vie, a laissé ces mots en 2002 : « Ce que j’aimerais pouvoir montrer un jour, si j’en ai le temps, c’est le moment où, sur son bûcher, le condamné demande à la foule venue assister à son exécution de prier pour son âme ». Ce souhait est réalisé aujourd’hui par Néjib (Haddon Hall, Stupor Mundi), directeur artistique chez Casterman.

L’intérêt du récit est d’alterner entre le déroulement du procès, le discours autobiographique de l’accusé et l’aventure de Jhen, à qui de Rais confie la mission de récupérer une statue qui pleure, dont les larmes pourraient apaiser les tourments. Même si l’éloignement du héros apparaît comme une ficelle permettant de respecter l’Histoire et l’univers de la saga, l’ensemble est cohérent et poursuit dignement l’œuvre du créateur. Et les quelques perspectives maladroites de Pleyers ne gâchent pas cette plongée moyenâgeuse, qui ravira les adeptes du Nom de la Rose, des Tours de Bois-Maury ou des Compagnons du Crépuscule.

Moyenne des chroniqueurs
7.0