L'abolition L'Abolition - Le Combat de Robert…

« C’est la mort que vous réclamez. Pas la justice. »

1972. Dans la nuit du 27 au 28 novembre, Robert Badinter, avocat, assiste impuissant à l’exécution par guillotine de son client Roger Bontems. Incapable de se résoudre à l’idée qu’on ait pu mettre à mort celui qui n’a pas tué, il fait de l’abolition de la peine de mort ­- cette sanction qui rend chacun de nous complice d’un assassinat commis par l’État - le combat de sa vie. Quelques années plus tard, c’est Patrick Henry qui est promis à l’échafaud. Qu’importe, si Badinter n’a pas pu sauver l’innocent, il sauvera le monstre. Car ce n’est pas le kidnappeur et meurtrier d’enfant qu’il doit défendre, mais la sanction capitale qu’il doit éradiquer. Le procès de Patrick Henry s’apprête à entrer dans l’Histoire comme celui qui verra disparaître la peine de mort en France…

Les faits sont connus, beaucoup s’en souviennent. Il s’agit ici d’un retour sur une expérience politique, d'un témoignage qui montre comment un candidat à la présidence de la république a été très clair sur ses intentions une fois élu. Vainqueur des élections malgré la réticence d'une partie de l'opinion, il a profité des premiers mois de son mandat pour passer à l'acte en nommant Robert Badinter au poste de garde des sceaux. Il explique également le courageux parcours de l’avocat qui a défendu la vie sous un angle purement éthique, malgré les atrocités dévoilées, mettant l'inhumanité de la peine capitale au cœur de ses plaidoiries. Le parcours de l'avocat futur ministre constitue la véritable trame du livre, évoquant sans détour des affaires sordides qui avaient choqué l'opinion dans les années 70.

Marie Gloris Bardiaux-Vaïente choisit dès le départ son angle narratif et s'y tient. Ceci donne un récit parfaitement adapté au format de la bande dessinée. Pas de surprise sur le dénouement évidemment ; l'abolition va être votée par l'Assemblée, mais la scénariste met en avant le courage intellectuel qui a conduit à cette décision. Malo Kerfriden s'appuie sur un dessin solide et met en scène de manière presque chirurgicale et très efficace les hommes qui ont marqué ce moment marquant. L’utilisation de la bichromie permet d'aller droit au but et de passer les messages sans tomber dans l’overdose de bons sentiments. Les flash-back sur le passé des Badinter ne se veulent pas larmoyants mais permettent d’en apprendre davantage sur l’homme et ce qui l’a construit, afin de comprendre ce qui l’a amené à un tel investissement dans sa quête. Le courage politique de ce ministre et de son président sont mis en avant et questionne sur ce qu’il se passerait aujourd’hui, dans cette France opposée à son gouvernement, si une loi d’une telle ampleur devait être votée.

Finalement, le lecteur aura pu apprendre beaucoup sur cette page d’Histoire et ses protagonistes. La conclusion à travers ce témoignage semble être que quelques hommes peuvent à eux seuls changer le futur. De quoi nourrir de l’espoir pour l’avenir.

Moyenne des chroniqueurs
7.5