Trap

L e héros de Trap, un trappeur, vit dans les bois avec son chien. Il chasse différents animaux, réels et imaginaires. Il se nourrit de leur chair, puis en prélève la peau. Lorsqu’il la revêt, il fusionne avec son gibier et s’en approprie les attributs, par exemple la force, la vision ou la vitesse. Avec ces panoplies, il est en mesure de se défendre et de s’attaquer à des proies dorénavant à sa portée ; certaines créatures se révèlent tout de même plus redoutables que d’autres. Puis il y a ce petit bonhomme d’apparence inoffensive. Avec ses airs quasi ecclésiastiques, on lui donnerait le Bon Dieu sans confession.

Après quelques projets à vocation didactique (Les mystères du monde quantique, Une mémoire de roi) où il se faisait bavard, Mathieu Burniat range les mots, du moins le temps d’un album. Dans cette aventure sans phylactères et sans cartouches narratives, tout repose sur les images. Le récit se montre néanmoins fluide, le lecteur suit facilement le cours de l’action, notamment parce que les illustrations sont nombreuses et explicites. Certaines séquences ont d’ailleurs une allure cinématographique alors qu’elles sont présentées en entier, dans une multitude de plans. En fait, le résultat évoque le dessin animé, et ce qui demeure fondamentalement violent et cruel finit immanquablement par être d’une grande drôlerie

Le trait caricatural de Mathieu Burniat, aidé de Loup Michiels, est très agréable. Les personnages sont éloquents, particulièrement leurs yeux dans lesquels l’effroi, le désir ou la satisfaction s’expriment sans aucune ambiguïté. Dans cet ouvrage qui adopte le format des mangas, le découpage se fait généralement sur trois bandes de deux cases, cela dit, les artistes n’hésitent pas à agrandir la taille des vignettes lorsqu’ils le jugent à-propos. Les couleurs, criardes, sont en phase avec l’esprit de ce livre aux accents psychédéliques : canidé bleu, monstre rose bonbon, ciel vert, etc.

Un exercice de style intéressant témoignant d’une belle maîtrise des codes de la narration graphique.

Moyenne des chroniqueurs
6.5