Isabelle Eberhardt

Q uand son tuteur et père potentiel décède, Isabelle Eberhardt n’a que dix-sept ans. Mais son caractère bien trempé et son goût pour l’aventure l’entraînent vers les horizons nord-africains. Là, vêtue en homme, elle devient Si Mahmoud, au grand dam de certains colons qui jugent cette aristocrate d’origine russe un peu trop excentrique. Cette dernière s’en préoccupe peu, tout entière séduite par les contrées qu’elle découvre et les solides amitiés qu’elle noue avec les autochtones.

Conçue par Christian Clot, la collection Explora des éditions Glénat a accueilli une nouvelle figure d’exploratrice. Moins connue que sa pair Alexandra David-Néel, Isabelle Eberhardt (1877-1904) n’en a pas moins marqué son milieu et son époque. Écrivaine, journaliste, farouchement attachée à son indépendance, convertie très tôt à l’Islam et proche des populations maghrébines qu’elle a côtoyées, cette jeune femme, morte accidentellement dans la fleur de l’âge, ne manque pas d’intriguer de par son mode de vie et ses idées. Lui consacrer un album est donc pleinement justifié et offre l’occasion au lecteur curieux d’en savoir davantage.

Virginie Greinier s’est donc attelée à raconter l’existence de cette aventurière hors du commun. Elle en brosse les grands traits et s’attarde sur les moments les plus significatifs : la mort du tuteur, l’émancipation, l’embarquement pour l’Afrique, le travestissement et le changement d’identité, les liens établis sur place, l’entrée dans une confrérie soufie, les soupçons des autorités françaises sur le possible rôle d’espionne, la grande passion amoureuse pour Slimène le spahi et, surtout, la fascination pour le Sahara, ses habitants et les coutumes locales. Malheureusement, le format en cinquante-six planches ne permet pas d’approfondir suffisamment ce personnage pourtant intriguant et certaines ellipses narratives nécessitent de se pencher sur le dossier en fin d’album afin d’effectuer quelques ponts et d’en savoir davantage sur des éléments à peine mentionnés au détour d'une phrase. En revanche, le texte ne manque pas de retranscrire des passages des écrits d'Isabelle qui permettent d'apprécier pleinement son goût pour l'Algérie et le désert. L’histoire est portée par le dessin d’Annabel que viennent appuyer les couleurs de Filippo Rizzu. Leur travail est de bonne facture, le trait réaliste et expressif de la première donnant agréablement vie à la principale protagoniste et à ceux qui l’entourent, tandis que quelques décors évocateurs et cadrages se révèlent plutôt réussis

Ce one-shot consacré à Isabelle Eberhardt a le mérite de faire connaître ou redécouvrir cette exploratrice. Pour vraiment captiver, il ne lui manque d’une chose : un peu de cette flamme qui a habité cette femme intrépide.

Moyenne des chroniqueurs
5.0