L'ogre amoureux

L e terrible comte de Barback est amoureux et il veut se marier (demain). Problème, il n’a pas de promise. Il décide d’épargner un renard imprudent prévu initialement à son menu afin que celui-ci l’aide à trouver une femme à son goût (façon de parler). Les goupils sont malins, c’est bien connu. Ce duo incongru part derechef sur les routes en quête d’une future conjointe.

Entre fable traditionnelle et conte pour enfants pas sages, Nicolas Dumontheuil a imaginé un récit loufoque et cruel comme il se doit. Bien armé des références habituelles du genre, le scénariste démarre son histoire en compagnie d’un voleur de poule et de son ami Ours tout droit sortis du Roman de Renard ou de Sylvain et Sylvette. La comparaison s’arrête là puisque l’affaire tourne rapidement à une enfilade d’incidents tous plus rocambolesques les uns que les autres qui se finissent invariablement par la dégustation d’un ou plusieurs protagonistes ayant eu le malheur de croiser Barback et son valet. Visiblement, un peu à l’image de Fred, Dumontheuil s’est contenté de laisser filer son imagination plutôt que de construire un scénario de A à Z. Heureusement, le créateur de Qui a tué l’idiot ? a de la ressource. Ses « trucs » d’écriture restent voilés et il réussit à maintenir un semblant de cohérence à son fil narratif.

Accompagnant des dialogues délicieusement décalés, le découpage et la charmante colorisation se montrent à la hauteur. Le trait mélangeant anthropomorphisme et caricature (tout le monde aura reconnu Gargamel sous les oripeaux du comte) est vivant en diable. La mise en page très classique s’avère également maîtrisée et efficace. À ce sujet, le dessinateur démontre un art de la profondeur particulièrement pointu. Résultat la lecture est entraînante et agréable.

Suffisamment ouvert pour n’imposer aucune réelle morale, L’ogre amoureux laisse la place à toutes les interprétations rendant ainsi l’ouvrage universel et, ne l’oublions pas, immensément drôle.

Moyenne des chroniqueurs
6.7