Le rire de l'ogre Le Rire de l'Ogre

1963, la guerre n’est apparemment plus qu’un mauvais souvenir. La poussière est retombée ; de part et d’autre du Rhin les gens recommencent à sympathiser. C’est dans ce cadre que Paul se rend en Allemagne pour passer quelques semaines dans la famille d’un correspondant avec qui il a peu en commun. Consolation, il rencontre la jolie Clara, laquelle a un fort ascendant sur lui. Elle s’intéresse à ses croquis, lui a ses films. L’été s'achève, le garçon retourne à Paris où il vit avec sa mère, veuve depuis que son époux a été assassiné dans les jardins du Luxembourg. Les destins des deux adolescents continueront à se croiser et à se décroiser bien après qu'ils soient devenus adultes.

Sandrine Martin fait son entrée dans le monde de la bande dessinée en adaptant Le rire de l’ogre, un roman de Pierre Péju. Il n’y a pas qu’un ogre dans ce récit. Il y a celui des cauchemars, un villageois qui étouffe sa progéniture, les soldats ukrainiens tueurs d’enfants, une sculpture réalisée par le jeune Parisien devenu artiste et, allez savoir si avec son tempérament de croqueuse d’hommes l’amie allemande ne fait pas partie du même club. Et si le seul véritable monstre était la guerre ? Se peut-il que, des décennies plus tard, certains événements ne se comprennent qu’à la lumière d’un conflit que l’on tente d’oublier ? Meurtre du père, violence dans les campagnes, premières amours, sans compter les cicatrices de la Deuxième Guerre, tout cela dans un seul livre. L’entreprise est ambitieuse, cela dit la lecture demeure agréable.

Dans ce projet, l’auteure tient également les pinceaux. Son dessin se montre plaisant, quoiqu’un peu relâché. La composition de certaines planches se révèle intéressante : une adopte la forme d’un kaléidoscope, une autre présente un immeuble sans mur, le lecteur voit donc ce qui se passe simultanément à chacun des étages, mais s’il y regarde de plus près, il constate qu’une action s'amorce au troisième pour se terminer au rez-de-chaussée.

Un album plaisant, à l'étroit dans ses cent-vingt pages.

Moyenne des chroniqueurs
6.0