Eden (Colin/Maurel) 1. Le Visage des Sans-noms

J onas n'a de cesse de lorgner vers le haut de la ville, en direction de cette forteresse abritant l'élite de la société qui domine outrageusement les quartiers pauvres où il réside avec ses parents. Envieux, l'adolescent rêverait de pouvoir imiter sa sœur qui a réussi le prestigieux examen lui permettant d'intégrer le domaine très prisé des élus. Mais il va devoir composer entre son désir de quitter cette caste des laissés-pour-compte et la révolte qui gronde et menace ces hautes sphères. Un choix crucial s'impose.

Prenez une cité, placez-y une pincée d'aristocratie quasi dictatoriale ; ajoutez une grosse dose de petites gens asphyxiés par un régime mais qui, par l'intermédiaire d'un groupuscule, tentent de s'y opposer. Mélangez le tout et laissez mijoter pendant soixante-seize pages pour obtenir un ouvrage d'anticipation et de dystopie. Soit des ingrédients classiques et fiables et, de prime abord, rien de bien novateurs. Pour autant, et malgré le challenge fixé, Fabrice Colin (La brigade chimérique, Tir Nan Og) parvient à façonner une intrigue solide et prenante portée par des personnages sympathiques pour les uns, énigmatiques pour les autres, tous placés à des endroits stratégiques. L'auteur déniche l'attrait et l'originalité de son scénario dans l'incorporation de membres issus de la même famille. Il s'amuse à tester la solidité des liens affectifs en les séparant, puis en confrontant leurs réactions face à une situation particulièrement délicate. Sa mixture qui n'en n'est qu'à l'étape de préparation, aurait gagné en intérêt en s'attardant un peu plus sur une présentation du pouvoir en place.

Les premières pages s'ouvrent sur une évidence : celle de se retrouver, sons et mouvements en moins, devant l'équivalent d'un dessin animé. L'expérience professionnelle de Carole Maurel (Comme chez toi, L'apocalypse selon Magda) y est certainement pour beaucoup. Sur un découpage tout à fait ordinaire, son graphisme ne s'embarrasse guère de détails et de précision, mais assure néanmoins un bon équilibre et une bonne homogénéité entre les traits de ses personnages et les arrière-plans.

Malgré quelques petits défauts ici et là, Eden et son tome 1 le visage des sans-noms, présente suffisamment d'arguments pour convaincre d'aller plus loin.

Moyenne des chroniqueurs
6.0