Ulysse (Lob) Ulysse

U ne décennie à Troie occupé à se battre ; autant d'années passées loin de sa femme. Alors oui, Ulysse a bien gagné le droit de retourner auprès des siens à Ithaque. Mais les dieux déplorent la fin de ces jeux de guerre. Aussi, afin de prolonger le divertissement, ils l’envoient pour une série d'épreuves supplémentaires dans le monde interdit. Accompagné de ses marins, le vaillant combattant continue son périple, sans se douter de ce qui l'attend...

Au commencement était le projet : adapter en bande dessinée l’œuvre d’Homère. Cette commande en 1968 par le Club Français du Livre ayant été refusée, Jacques Lob et Georges Pichard se tournent vers le mensuel italien Linus. La traduction française se fit ensuite dans Charlie et se termina dans Phénix. En 1974, l’ensemble est publié dans le quotidien France-Soir, Dargaud en fait deux albums en 1975 qui seront réunis en intégrale par Glénat en 1981. La version en noir et blanc ressort ici, en 2018.

Les auteurs ayant déjà collaboré sur Ténébrax et Blanche Épiphanie, ils se connaissent bien. Cette osmose s'exprime dans la parfaite adéquation entre la retranscription des trouvailles de l'un et leur traduction en images de l'autre. Tout en respectant l'esprit et la trame de l'original, Jacques Lob a ajouté un aspect SF délicieusement kitsch et un casting féminin des plus sensuels. Osés et cohérents, les anachronismes et les pirouettes scénaristiques épousent avec mimétisme et audace ces péripéties vieilles comme Hérode. Certes, les filles sont sexy, mais elles sont surtout belles et intelligentes. La vulgarité n'est pas de mise dans cet ouvrage gentiment polisson où l'aventure prime.

Avec un style plus réaliste que sur Submerman, Georges Pichard allie comique et séduction. L'ambiance seventies hippie se ressent dans les vêtements, les coupes de cheveux et la silhouette longiligne des personnages qui s'épanouissent et s'intègrent naturellement dans le contexte «mythotechnologique». Des onomatopées « dans le texte» à la typographie psychédélique virevoltent dans les décors à la trame travaillée avec talent, des buffles côtoient des androïdes, Zeus et Athéna observent l'humanité sur des écrans d'ordinateur et Circé agite son fouet, tout est normal.

Un peu coquine, (im)pertinente, très inventive et surtout, vraiment réussie, cette épopée revisitée n'a aucunement perdu de sa qualité sous la patine du temps.

Glénat réedite également *Submerman

Moyenne des chroniqueurs
7.5