La route de la vie la route de la vie

A utomne 1941. Les neiges sont précoces, mais c’est tout de même ce moment que choisissent les troupes allemandes pour envahir l’URSS. Leningrad est bombardée, des maisons sont détruites et c’est ainsi qu’Olenka se retrouve orpheline avec pour compagnons son chien Popovic et un violon. Dans cette dévastation où plus rien n’a de sens, elle se réfugie dans une rêverie peuplée de Roussalki (femmes-poisson pataugeant dans le fleuve), d’un aigle à deux têtes et d’une sorte d’ankou qui sème les cadavres. Mais surtout, il y a Flamme, déesse endormie sous l’eau gelée et Hiver, son amoureux. Pour la délivrer, la fillette doit jouer de son instrument jusqu’à ce que fonde la glace, dût-elle en avoir les doigts en sang.

L’univers échafaudé par l’enfant se révèle complexe. Il offre une explication à son drame et à celui de son quartier dévasté ; il lui donne une raison de vivre alors qu’elle est convaincue d’être la seule à pouvoir sauver son monde. Pour raconter cette histoire, Giovanni Furio propose un texte riche et poétique, particulièrement quand les créatures chimériques s’expriment, souvent de façon théâtrale. C’est d’ailleurs de cela dont il s’agit, d’une tragédie faite de gentils et de méchants, réels et imaginaires, avec au milieu une gamine égarée dans ses songes.

Les illustrations de Marco Nizzoli s’avèrent à la hauteur du projet. Avec son coup de crayon réaliste, il peut tout représenter : appartement en ruine et toiture d’une cathédrale byzantine, demoiselle en pleurs et sirène cadavérique, oiseau de proie bicéphale et chouette, entité végétale et personnification de la mort… tout lui semble facile. Sa mise en couleur à l’aquarelle est tout aussi exceptionnelle ; les demi-teintes qu’il pose sur ses dessins apportent un surplus de caractère à son trait qui en a déjà beaucoup.

Un récit original et ambitieux, construit sur un assemblage d’événements historiques et de mythologie slave.

Moyenne des chroniqueurs
7.0