La tomate La Tomate

D ans un futur relativement éloigné, des agents ont pour mandat de faire table rase du passé : livres, œuvres d’Art, tout est systématiquement et impitoyablement détruit. Les villes sont bétonnées, la nourriture et l’eau sont rares et rigoureusement rationnées. Anne, qui travaille pour le service d’épuration, trouve par hasard quelques semences qu’elle plante dans une poignée de terre. Cet accroc aux mœurs et aux lois de son époque est le début de la fin, du moins la sienne.

L’idée à la base de La tomate, un récit signé Anne-Laure Reboul, n’est pas vilaine. Dans un monde où tout est contrôlé, il suffit de peu pour rompre un équilibre artificiel et fragile. Mais au fur et à mesure qu’il progresse dans l’album, le lecteur réalise que le prétexte est trop mince. Il peine à admettre que le végétal soit la source de tant d’émotions et qu’il vaille à la pauvre fonctionnaire un si dur procès, par moment presque ridicule tellement le ton des magistrats est pompeux. La dénonciation du totalitarisme aurait gagné à s’exercer dans un cadre plus convaincant ; peut-être le bédéphile aurait-il été moins réfractaire à cette fable si on lui avait expliqué les origines de cette société improbable.

Le dessin de Régis Penet interpelle davantage. Dans les bandes et les cases, il intègre des bâtiments aux arêtes sévères; même le vêtement de la protagoniste est rayé. Toutes ces lignes droites contrastent particulièrement bien avec la rondeur de l’aliment. Les vignettes sont peu nombreuses ; souvent allongées, elles renforcent l’effet de l’emprisonnement dont tout un chacun est victime. Les couleurs, fréquemment en aplats ou texturées, accroissent quant à elles l’artificialité de cette civilisation.

La morale de l’histoire : que ce soit une pomme ou une tomate, il faut toujours dire non au fruit défendu.

Moyenne des chroniqueurs
6.8