VII

L a mort termine VI, le sixième tome de sa série favorite. Elle commence dès lors à attendre un nouvel opus. Le romancier s’avère cependant en panne d’inspiration. La pression est forte ; il tente de se détendre de toutes les façons (alcool, cachets, karaoké, etc.) et rencontre en vain un psychologue. Il abandonne et finit par consacrer tout son temps à des futilités, ce qui indispose son plus grand admirateur. Ce dernier se fait de plus en plus insistant et va jusqu’à kidnapper l’écrivain pour le forcer à se remettre au travail.

Comptant près de cent quarante planches, le roman graphique de Thom (alias Thomas Blais-LeBlanc) se lit très vite, d’autant plus qu’il ne comporte pas de dialogues ou de cartouches narratifs. L’anecdote, bien qu’elle soit linéaire et sans réelle surprise, est agréable. Le syndrome de la page blanche a certes déjà inspiré bien des auteurs, mais le traitement de VII est original et il démontre une belle créativité.

Dans ce premier ouvrage, le Québécois travaille en noir et blanc. Son univers est au confluent de nombreuses sources d’influence ; le lecteur y découvre l’esprit de Trondheim (anthropomorphisme et naïveté) et de David B (multiplication des référents mystiques), tout comme celle du dessin animé américain (exagération de l’expressivité des acteurs et des objets). Au fil des cases, le bédéphile note une multitude de clins d’œil. Quelques-uns tissent des liens avec l’histoire (Sigmund Feud, Edgar Allan Poe) ; la plupart sont néanmoins disparates (Télétubbies, club de hockey sur glace Canadien, La Guerre des étoiles). Ce jeu de recherche des indices amuse, sans toutefois véritablement enrichir la lecture.

Petit truc énervant, pour faire l’économie d’une version anglaise, l’album est bilingue. C’est vrai dans les parties périphériques (résumé, remerciements et biographie de l’artiste), de même que dans le récit, ce qui est davantage embêtant. Quelques exemples : sur un bout de papier quelqu’un a écrit I O U 1 $ (je te dois un dollar), un engin a pour nom Relax Machine et sur une boîte d’œufs il est inscrit Dragons Eggs. Le malaise demeure dans le choix des onomatopées, splash (plutôt que plouf), arf (wouf) ou encore gasp (gloup).

Une première œuvre sympathique par un jeune bédéiste créatif et plein de potentiel.

Moyenne des chroniqueurs
6.0