Rouge Himba Rouge Himba - [Carnet d'amitié]…

P euple semi-nomade aux traditions ancestrales, les Himbas occupent le Kaokoland (ou Kunene), un territoire quasi-désertique aux confins de la Namibie. Confrontés à la modernité, ils tentent de conserver leur mode de vie, certes très modeste, mais durable et en parfaite harmonie avec les maigres ressources de leur région. En 1993, Solenn Bardet, arrivée là le sac au dos, est immédiatement tombée sous leur charme. Elle s'installe pour quelques temps et finit par se faire officiellement adopter par une famille du cru. Depuis, elle n’a eu cesse de multiplier les actions d’aide au développement et de sensibilisation via la fondation Kovahimba. En 2015, elle « embarque » Simon Hureau dans ses bagages pour illustrer un énième voyage au bout de l’Afrique.

Sous-titré Carnets d’amitié, Rouge Himba est avant tout un témoignage et un hommage à ces femmes et ces hommes qui, malgré des conditions matérielles précaires (aux yeux des Occidentaux), ont su garder leur dignité sans perdre leur sens de l’hospitalité. La chose étant dite, la réalité de la brousse est radicalement différente et le choc est violent, même pour un baroudeur de la trempe du dessinateur du Bureau des prolongations ! Il y a le climat, évidemment, avec ce soleil implacable, mais aussi le passage du confortable avion à la latérite de ce qui fait office de piste. L’eau est rare, l’électricité encore plus et le confort succinct. Pas effrayé pour autant, Hureau embrasse cette immersion dans la terre ocre avec enthousiasme et s’attelle à la tâche pour en ramener un maximum d'impressions. Le résultat est un album splendide, riche et enivrant.

L’ouvrage forme également un véritable traité d’anthropologie et d’ethnologie. Solenn Bardet n’a de cesse d’expliquer telle ou telle coutume, de préciser un détail d’un rite ou de pointer une pièce d’habillement significative. Les plus curieux pourront même acquérir quelques notions d’herero, langue éminemment complexe, avec une méthode express présentée en annexe ! La lecture en devient presque étouffante, tant les informations s’accumulent au fil des pages. Heureusement, l’artiste de l’expédition est là pour organiser au mieux cet imposant exposé. Anecdotes décalées, observations amusantes et pas mal de portraits hilares, il habille talentueusement avec espièglerie cette somme d’érudition.

Extraordinaire invitation à la découverte, plaidoyer pour la défense des cultures en péril, Rouge Himba est un joyau d’émotion bourré d’images et de souvenirs incroyables.

Moyenne des chroniqueurs
8.4