Klimt Klimt - Judith et Holopherne

V ienne, 1901. Gustav Klimt jouit d’une bonne notoriété, mais insuffisante pour sauver l’œuvre, dite obscène, qu’il a peinte pour l’école de médecine. Il se réfugie dans son atelier où cohabitent des chats et quelques modèles, toujours nues. Ses songes le projettent dans la Babylone antique ; chef d’armée, il y combat les juges, les académiciens, les professeurs… et les médecins. Les temps sont durs pour le marginal qui subit la réprobation générale, celle de sa mère comprise, Mais voilà que les Bloch-Bauer, un riche industriel et son épouse, lui disent à quel point ils apprécient son art. Ils sont à ce moment les seuls.

Dans cette biographie romancée, Jean-Luc Cornette s’attarde sur une minuscule portion de la vie du bohème, à savoir les semaines qui ont précédé la création d’une de ses réalisations les plus célèbres : Judith et Holoferne. La trame, a priori plutôt simple, s’avère finalement astucieuse. Elle crée un lien entre deux peintures en apparence dissemblables. Pour y parvenir, elle passe par les rêves qui amèneront le protagoniste à réaliser que celle qui libérera son génie est tout près de lui. Il faut avouer que dans cette ville, au début du XXe siècle, Sigmund Freud n’est jamais bien loin. Bien qu’il ne soit mentionné qu’une seule fois, son aura s’impose.

De la capitale autrichienne il y a cent ans, à la Mésopotamie trois millénaires plus tôt, Marc-Rénier relève le défi de recréer des univers crédibles et réalistes. Ses reproductions des tableaux du maître sont tout aussi convaincantes, tout comme ses décors typiques de l’Art nouveau. Dans l’ensemble, l’illustrateur demeure relativement conservateur et ce n’est certainement pas un reproche dans un ouvrage biographique. La composition se révèle dynamique, le lecteur y retrouve de nombreuses cases très allongées qui rappellent les formats des toiles de l’artiste. La mise en couleurs de Mathieu Barthelemy est également réussie ; ses teintes feutrées, souvent dans des tons de jaune ou de beige, évoquent, jusqu’à un certain point, les dorures de l’auteur du Baiser.

Un joli récit sur l’inspiration. Le bédéphile ne sait trop discerner le vrai de la fantaisie, mais dans le fond, peu importe, ce qui compte c’est que la lecture soit agréable.

Moyenne des chroniqueurs
7.0