Le chat du Rabbin 7. La Tour de Bab-El-Oued

« Le seul truc utile dans vos religions, le seul, c’est que parfois ça autorise de dire au voisin casse-toi, ici c’est pas chez toi. »

Depuis que Zlabya a eu son bébé, le chat se sent délaissé. Comble de malheur, deux adorables chatons frappent à la porte, font craquer sa maîtresse et lui volent son lait. Le félin erre dans les rues où il observe de surprenantes tractations interconfessionnelles. Lorsque la mosquée se voit inondée, l’imam rencontre le rabbin pour lui demander si ses fidèles pourraient prier dans son temple. Mais la synagogue est elle aussi remplie d’eau. Les deux hommes devront réfléchir de concert pour trouver une solution à leur problème. Tout devrait opposer ces compagnons d’infortune mais, dans le fond, ils s’aiment bien. Lorsqu’ils déambulent bras dessus, bras dessous en devisant sur leurs cultes respectifs, ils paraissent être les meilleurs d’amis du monde, même si l’un mange casher et l’autre halal.

Avec La Tour de-Bab-El-Oued, Joann Sfar propose un ouvrage qui a parfois l’allure d’un prêche sur le vivre ensemble. La proposition est certes noble, mais elle a un air de déjà-vu. Le scénariste n’a tout de même pas perdu sa verve. Alors que la rectitude politique actuelle interdit la critique de la croyance, il n’hésite pas à s’en moquer, à relever ses contradictions et à insister sur sa propension à antagoniser les gens. Dans cette fable, bien qu’il soit passablement absent, le plus lucide est certainement le matou qui souligne l’absurdité de la chose religieuse. Le discours a beau être par moment un peu lourd et didactique, il s’avère au final plutôt agréable.

Le style de l’illustrateur est reconnaissable entre tous. Les couleurs sont vives, voire criardes, les vignettes ont leurs habituels contours incertains, le trait est fin et nerveux. Le dessin, naïf, qui, bien qu’il semble réalisé rapidement, est joli, élégant et fourmillant de détails, tant dans le motif d’un tapis que dans celui des arrière-plan. L’artiste démontre, une fois de plus, qu’il est doué pour aller à l’essentiel en quelques coups de crayon.

Un album pertinent, à lire, sans trop se presser, pour entendre le propos de l’auteur et pour apprécier ses illustrations.

Moyenne des chroniqueurs
7.0