Reporter 2. Les Derniers Jours du Che

À Cuba, les filles sont belles et le rhum coule à flots. C'est dans un bar de la Havane que Yann Road, reporter de terrain encore vert, rencontre un confrère du New-York Times qui lui confie qu'Ernesto Guevara, introuvable depuis son échec au Congo, se trouverait en Bolivie pour diriger la révolution naissante. En ce mois d'avril 1967, le correspondant français se fie à son intuition ; il n'hésite pas à s'enfoncer dans la jungle et à se mêler aux guérilleros pour faire, espère t-il, une rencontre exceptionnelle et peut-être, le reportage de sa vie. Il est loin de se douter que ce seront là les Derniers jours du Che.

Après Bloody Sunday,
Renaud Garreta et Laurent Granier s'attellent, non plus à un événement, mais à une figure célèbre majeure. Le lecteur retrouve Yann, le personnage récurent de la série. Le début du récit est assez verbeux du fait de la mise en place du contexte politique et de la recherche des éléments pour la localisation du Che. Cela entraine un déséquilibre au niveau du texte et de la composition des cases : les phylactères chargés sont clairement à l'étroit et étouffe le dessin. La narration s'aère cependant au fil de la lecture avec une fin plus riche en émotions, le point d'orgue étant le retour du corps du Che, son exposition et le témoignage du supposé bourreau. La tension monte ainsi progressivement et l'immersion devient naturelle de par la crédibilité du propos et la bonne explication des enjeux de part et d'autres, notamment l'opportunisme du gouvernement bolivien qui ne crache pas dans la soupe américaine et vice versa. Le duo d'auteurs parvient à un bon mélange entre fiction et réalité grâce à personnalité attachante du journaliste idéaliste et de la précision des informations avérées, l'aventure du jeune chroniqueur servant de fil directeur pour dynamiser le fond historique.

Le graphisme réaliste de Gontran Toussaint est de bonne facture, particulièrement dans les paysages vivants et détaillés, néanmoins, il reste assez irrégulier dans l'exécution des visages, souvent empreints de rigidité. Les couleurs prononcées surprenantes donnent un rendu «old school» qui, passé les premières pages, colle finalement bien au contexte de l'époque évoquée. Avec l'expérience et son talent manifeste, nul doute qu'il saura se départir de son classicisme pour acquérir son propre style et remédier à ses petits défauts.

Malgré des débuts un peu bavards, ce docu-fiction s'avère relativement intéressant et captivant. En évitant tout parti-pris, le scénario s'attache à mettre en évidence l'influence d'un homme qui, par son aura et son charisme indéniables, fit trembler les plus grandes puissances.

Moyenne des chroniqueurs
6.0