Le livre des livres Le Livre des livres

À force de s'amuser et de retourner son joujou de prédilection, Marc-Antoine Mathieu devait bien finir par assumer pleinement sa fascination pour l’objet livre. C’est chose faite avec Le livre des livres, un intrigant volume composé de plats et de résumés. Un concept de plus atomisé par le créateur de Julius Corentin Acquefacques ? Oui, mais l’entreprise ne se limite pas qu'à un nouveau coup de force formel : bienvenue dans une bibliothèque des possibles.

En y regardant de plus près, force de constater que toute l’œuvre de Mathieu semble mener à cet album. Ses influences de toujours – Borgès, Perec, Goossens -, son goût pour les aphorismes graphiques et ses interrogations métaphysiques se trouvent en bonne place. À la meilleure en fait, puisque, encore plus que dans Sens, le scénario est laissé au libre arbitre du lecteur. Visite ludique chez Gutenberg, Alice au pays des métaphores ou Essai pataphysique sur le poids de l’encre dans nos vies ? Chacun se débrouillera avec ses références culturelles pour saisir toutes les subtilités de ces pages pleines d’esprit et d'érudition.

Certes, la lecture ressemble beaucoup à une expérience scénographique ou à un happening artistique et moins à une BD classique. Le propos est ambitieux et demande quelques efforts pour vraiment s’apprécier. D’un autre côté, l’éventail des ouvrages balayés est si large que tout le monde y trouvera chaussure à sa taille. En revanche, il est très important de prendre son temps en décortiquant ces dessins riches en détails plus ou moins cachés ou cryptiques. Rien n’a été laissé au hasard, chaque vétille porte un indice ou une bribe d’information qui enrichit cette ascension dans les sous-sols de la création humaine (nota : les perspectives sont souvent trompeuses).

Exercice de style, hommage à l’écrit et à l’image, réflexion philosophique, Le livre des livres joue – au sens propre et figuré – sur tous les tableaux. Une nouvelle perle de Marc-Antoine Mathieu qui, la preuve en est faite une fois de plus, n’a pas fini de nous épater et de nous charmer.

Moyenne des chroniqueurs
8.0