La nef des fous 8. Disparition

T andis que le Sergent Bonvoisin essaie de convaincre Baltimore de rempiler, la Reine Ophélie parvient à souffler à son souverain d'époux, Clément, l'idée d'organiser un gala de charité. Grâce au clou du spectacle, le numéro de magie du grand Hidinou, les monarques comptent bien récupérer quelques donations forcées auprès de leurs plus riches sujets. La soirée risque d'être mouvementée entre la venue d'Ambroise, le paria au boulet, et les humeurs de la princesse Chlorenthe. Pas de doute, La Nef des fous est de retour !

L'annonce de Turf de reprendre sa nef avait déclenché quelque chose d'ambigu chez le fan de la première heure. D'un côté une joie intense, limite gênée, de pouvoir retrouver ce monde déjanté ; de l'autre, la crainte de l'album de trop alors que tout avait été aussi bien conclu. Mais force est de constater que Disparition se fait pencher la balance dans la première catégorie !

Si sa série lui a certainement manqué, il paraît clair que l'auteur a soigné son retour sans n'avoir rien perdu de sa verve. Sur deux lignes narratives - un trafic de coloquintes (!) et la soirée au château - il avance ses pions en réinstallant le contexte baroque et loufoque qui a fait le succès de son univers. Le verbe tout « poquelin-ien » est à nouveau au rendez-vous et accompagne un comique de situation toujours aussi marqué et efficace qui repose sur des duos efficaces : Baltimore et son chef, Chlorenthe et sa mère, la Reine et le Roy. Les situations incongrues s'enchaînent avec bonheur et les quiproquos succèdent aux malentendus sans jamais rompre le fragile équilibre de ce microcosme. Tout en se laissant porter, le lecteur découvre le nœud de l'intrigue sur un rythme tranquille que les puristes pourront quelque peu regretter. Toutefois, si le tout manque d'un soupçon de passion et d'un ou deux grains de folie pour pleinement emporter l'adhésion, l'essentiel est présent et c'est déjà beaucoup.

Toujours détaillés, les décors comme les costumes - qu'ils soient d’apparat ou de fonction - flattent l'œil tandis que les aquarelles chamarrées habillent un trait précis et léger. Plus sage dans son découpage, l'auteur du Voyage improbable n'en est pas moins généreux dans son dessin et cet opus s'inscrit dans la continuité graphique des précédents.

Les plus chagrins diront que ce Disparition n'a rien d'indispensable, mais à part vouloir bouder son plaisir, aucune raison non plus de se priver d'un peu de rab quand il est de qualité.

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Moyenne des chroniqueurs
7.0