Oublie mon nom

L a disparition de sa grand-mère va provoquer un bouleversement intérieur considérable chez Zerocalcare. Bien qu’il ait toujours été très proche d’elle (il a habité avec elle pendant une partie de son enfance), il se rend compte qu’il ne la connaît pas vraiment. Tiens, au fait, comment une Française distinguée de Nice s’est retrouvée à vivre à Rebibbia, une banlieue pourrave de Rome ? Et sa mère, pourquoi est-elle affublée d’un nom anglais ? Pis, c’est quoi cette histoire de bague russe sur laquelle il doit remettre la main pour les funérailles ? Et tous ces silences quand il pose des questions à propos de ses origines ? Putain, comment on fait pour grandir quand on ne sait pas d’où on vient ? Merde à la fin, quelqu’un va finir par me dire ce qu’il se passe dans cette famille !?

Si Oublie mon nom aborde un sujet très personnel, le style déjanté et décalé de ‘Calcare, comme l’appellent ses potes, est immédiatement reconnaissable. Il faut s'y faire, même quand il parle de l’intime, c’est de façon punk. Édité comme un blog avec d’innombrables mini-chapitres, le fil narratif zigzague, divague, prend des pauses, saute des étapes et se permet des interludes animaliers ou fantastiques. Le lecteur en vient à se demander de quoi au juste parle le scénariste. Puis, peu à peu, les différentes pièces du puzzle se mettent en place et une image incroyable et inimaginable apparaît.

Force est de constater que, sous un aspect foutraque, le scénario suit son petit bonhomme de chemin d’un pas assuré. Certes, l’auteur de Kobane Calling a le cerveau qui carbure à la caféine concentrée, mais il sait garder les idées claires. Sous la tempête, il a parfaitement arrangé son enquête. Les révélations tombent régulièrement et il est difficile de lâcher l’ouvrage avant sa conclusion. Ce chaos organisé se montre redoutable d’efficacité, profondément touchant et immensément drôle (« Dans l’échelle de l’abrutissement humain, Downton Abbey se situe entre la masturbation aux heures de repas et l’héroïne. »).

Regard vers le passé qui sait garder les pieds bien ancrés dans le XXIe siècle, Oublie mon nom possède toutes les qualités d’une œuvre totalement aboutie. Zerocalcare est un artiste important du Neuvième Art qu’il faut absolument lire.

Moyenne des chroniqueurs
8.0