Lady of Shalott

U ne série de meurtres sordides dans lesquels les victimes et les scènes de crime sont grimés pour ressembler à des peintures célèbres agite Genève. La Brigade des Enquêtes Réservées (cf. CH Confidentiel) est sur les dents, d’autant plus qu’une importante exposition d’art vivant est sur le point de s’ouvrir. C’est cette dernière manifestation qui a fait revenir Stéphane Clément et Cynthia dans la Cité de Calvin. Comme à son habitude le globe-trotter va se retrouver mêlé à l’affaire sans le vouloir…

Quatre ans après Le piège ouzbek, Daniel Ceppi propose un cross-over inédit qui mêle ses deux séries principales, le tout dans sa ville natale. Pour ce thriller conçu en suivant les règles de l’art (!), le scénariste a intelligemment puisé dans l’histoire respective de ses héros pour nourrir une intrigue très classique, digne des meilleurs polars scandinaves en vogue. L’union entre Stéphane, l’éternel bourlingueur, avec les limiers limite lourdingues de l’élite de la police fédérale helvétique surprend un peu au premier abord. En effet, peu de chose relie ces univers. Pourtant, cette association inusitée fonctionne plutôt bien au final, même si la multiplication des protagonistes (sans parler des démons surgissant du passé) rend la lecture un peu confuse par moments. Ceppi préfère avancer masqué laissant le lecteur se débrouiller pour boucher les vides et relier les différentes pistes. Sans vraiment être gênante, la situation nécessite néanmoins beaucoup d’attention (ou plusieurs relectures) pour totalement s’apprécier.

Encore plus que dans ses œuvres précédentes, l’auteur a pris un soin tout particulier dans la description du cadre de cette aventure : sa Genève et plus particulièrement son quartier, Plainpalais. Les rues, les façades, les innombrables bistrots et, plus généralement, son atmosphère sont rendus avec force précision et détails. Le dessinateur aime ces lieux, ça se sent. Moins percutants, les personnages et, globalement, la mise en page se montrent en retrait. Les visages, peu esthétiques comme taillés à la serpe, le découpage très serré et un certain manque de dynamisme se fait remarquer. En gros, les illustrations semblent avoir été tellement travaillées que, tels ces acteurs qui sur-jouent leur interprétation, le résultat en paraît artificiel, car trop forcé.

Whodunit habilement construit, Lady of Shalott s’avère efficace et finement imaginé. Dommage cependant que sa réalisation graphique souffre d’une certaine crispation. Celle-ci, souvent visible, gâche un peu cette réunion entre voyageurs et enquêteurs, là où tout a commencé il y a quarante ans.

Moyenne des chroniqueurs
6.0