Yin et le dragon 2. Les Écailles d'or

1937. Shangaï est occupée par l'armée du Japon qui envahit peu à peu les banlieues avoisinantes. Avec la complicité de la nuit, Yin et son grand-père emmènent le dragon d'or pour une première sortie en mer. Quasiment remis de ses blessures et revigoré par l'air frais, la créature les remercie d'un filet rempli de poissons. Le repas qui suit est propice aux confidences. Guang Xinshi avoue à ses sauveteurs que son ancien maître et ennemi millénaire, Xi Qong, est de retour. Plus que jamais décidé à se venger des hommes qui l'ont déchu de son trône, il est sur le point de déverser sa fureur vengeresse. La menace à une double origine : des terres et du fond de l'eau. Qui, des militaires ou du dieu à écailles, sera le plus dévastateur ?

Richard Marazano (Fleur de bambou et Mémoires de la guerre civile tout récemment) apporte de nombreux éclaircissements dans cette deuxième partie. Le passé et les relations tumultueuses des deux êtres ailés sont dévoilés, mettant en place les enjeux et les motivations de chacun. L'officier japonais Utamaro, étrangement bienveillant, amène une touche d'humanité, tiraillé entre son engagement pour son pays et la population en otage sous le joug de l'envahisseur. Et bien sûr, la petite héroïne ! Elle s'étoffe, portant l'espoir sur ses épaules. Obligée de grandir brutalement, elle quitte le monde de l'enfance. Elle incarne à elle seule le courage et la volonté de sa nation. La force du scénario réside dans la profondeur des personnages et le mélange habile de fantastique et de faits historiques (le massacre de Nankin, famine, exil), épaississant l'intrigue par une réflexion sur des thèmes universels. L'évolution du ton est manifeste : il se durcit à cause des conflits qui se précisent et l'étau qui se resserre sur la ville et ses habitants. L'album se termine sur un suspens tendu, relativement dramatique.

Chinois Xu Yao, débutant dans le domaine de la bande dessinée, démontre déjà un talent certain. Son graphisme s'inspire ouvertement du manga mais garde une allure réaliste. Le trait léger et rond, dans la même veine que Le monde de Milo ([url]http://www.bedetheque.com/BD-Monde-de-Milo-Tome-1-Le-Monde-de-Milo-T01-185158.html)[/url] exprime une sensibilité avérée. Le jeu de lumières et les couleurs très douces, veloutées, ont vraiment leurs places en donnant la tonalité aux scènes et atténuant la dureté du contexte.

Les écailles d'or est un tome de transition qui fait avancer le récit tout en l'enrichissant. La dimension émotionnelle chargée et plus sombre prépare le lecteur à la terrible bataille finale qui s'annonce, entre magie et balles réelles.

Moyenne des chroniqueurs
7.0