Les années rouge & noir 2. 1946-1951 Alain

P aris, 1946. L’unité nationale prônée par le Général De Gaulle se fissure déjà, alors que la reconstruction ne fait que débuter. Communistes, FFI et anciens collabos fraîchement pardonnés s’affrontent pour le pouvoir dans l’ombre du grand Charles. Pendant ce temps, Alain Véron embauche chez Renault tout en continuant son enquête à propos de la mort de son frère. De son côté, Agnès Laborde entre au Ministère de l’Intérieur, tandis qu’Aimé Bacchelli attend son heure en prison. Et les fameuses fiches de renseignements ? Bien cachées dans le Tyrol italien, elles seront pour celui qui saura les retrouver…

La partie reprend de plus belle dans Alain, second tome des Années Rouge et Noir. En résumé, personne n’est sorti de l’Occupation sans avoir un ou plusieurs squelettes dans son placard et chaque trace de compromission est devenue une menace potentielle. Collant de près à l’Histoire avérée, le scénario décrypte avec précision et moult explications toujours aussi envahissantes les mois qui suivirent la Libération. Les situations sont complexes, autant au niveau politique que personnel. Résultat, même en simplifiant un peu les choses, Pierre Boisserie et Didier Convard sont obligés d’inonder leur découpage de scènes purement illustratives pour tenter de démêler les différentes forces en présence. L’initiative est louable, mais alourdit terriblement la lecture, alors que de nouveaux personnages apparaissent et que d’autres prennent du galon. Dense et très lourd, l’album manque de moments de répit ou de respiration. Évidemment, les amateurs de BD bavardes « à l’ancienne » et de sagas sur fond de trahisons et de révélations fracassantes seront certainement ravis, les autres prendront leur mal en patience en détaillant les avalanches de textes.

Graphiquement, Stéphane Douay fait ce qu’il peut pour trouver sa place entre deux phylactères. Son trait, parfois hésitant (les caricatures, ce n’est vraiment pas son truc), vise avant tout la clarté. En associant une mise en scène très classique et efficace, ce dernier réussit à offrir une copie tout à fait acceptable. Par contre, un peu à la manière de Fabien Bedouel (Kersten, médecin d'Himmler) mais avec moins de réussite, le dessinateur se montre peu à l’aise pour retranscrire les émotions. Ses protagonistes, les visages surtout, manquent de nuances et de personnalités. Plus convaincantes, les couleurs très appliquées de Marie Galopin – l’ouverture en pleine tempête de neige est admirable – habillent avec beaucoup d’élégance ces pages remplies de doutes et de rebondissements.

Très ambitieux, à en devenir quasiment étouffant, Les années Rouge et Noir en impose. Même si, au vue la richesse du propos, quelques planches de plus n’auraient été pas été de trop pour alléger la narration, la série offre une fresque réaliste et dramatique de cette période pleine d’espérance et de bouleversements.

Moyenne des chroniqueurs
6.0