Thierry Laudacieux 1. Le réseau Madou

E n 1938, à Bruxelles, Isidore Hogier semble mener une vie bien paisible. Animateur à l’Institut National de Radiodiffusion, il fait connaître chaque après-midi les nouveaux talents du jazz américain. Il est ami avec le fils de sa logeuse, Thierry Laudacieux, adolescent épris de bande dessinée. Un jour, Isidore confie une mission à Thierry et lui révèle être un agent secret à la solde des États-Unis. Il anime le Réseau Madou, constitué de sept membres. Mais l’un d’entre eux est un traître qu'il faut démasquer.

Dargaud ressort cet album, dont l’original date de 1982, retravaillé, augmenté et embelli. François Rivière (scénario) et Alain Goffin (dessin) font ici œuvre de nostalgie. L’intrigue, plutôt bien tournée, est un prétexte pour rendre un hommage à la BD belge du milieu du 20ème siècle et à Bruxelles, ville d’adoption pour l’un, d’origine pour l’autre. C’est avant tout une plongée dans la ligne claire et les multiples références - et révérences - à ceux qui en ont fait l’âge d’or, d’Hergé à E.P. Jacobs, en passant par Jacques Martin ou Tibet. En digne héritier, Goffin croque parfaitement la capitale belge, de ses apparats Art Déco à ses élégantes demeures de la fin du 19ème siècle. Le charme agit indiscutablement, particulièrement avec les pleines pages, ajouts de cette réédition.

Le récit, quant à lui, fait sien les canons de l’époque : le jeune héros qui a soif d’aventure, les tensions internationales en arrière-plan, les déplacements nocturnes ambiguës, le scoutisme moralisateur. Cependant, des éléments modernes allègent le propos, tel le personnage féminin de Marie-Véronique de Flandres ou des incises narratives ouvrant un faisceau de questions qui trouveront réponses au dénouement. Le scénariste prend également plaisir à installer un autre album – les Aventures de Nick et Rudy dont Thierry est friand – comme véritable élément de l’histoire, et pas seulement comme clin d’œil sympathique.

Cette recréation du Réseau Madou est plaisante et opportune. Le second et dernier tome, La Mine de l’Étoile, aura-t-il droit à la même attention ? En attendant, voici l’occasion de se replonger dans un style qui n’a pas fini de fasciner.

Moyenne des chroniqueurs
8.0