Udama Udama chez ces gens-là

A près son congé maternité, Claire s’apprête à reprendre son poste au sein de la société immobilière où elle travaille. Pour garder Rose, son bébé, elle a fait appel à une jeune femme malienne, Udama. Mère célibataire, cette dernière est ravie de trouver si facilement un emploi alors qu’elle n’a aucune qualification. Prête à s’investir totalement, elle fait quotidiennement un trajet éreintant de son logement miteux de banlieue vers l’appartement parisien cossu de ses employeurs. Elle n’ose pas demander les clés du domicile et reste ainsi cloîtrée avec la petite fille, tandis que Claire rentre toujours plus tard et délaisse Hervé, son mari.

Avec Udama chez ces gens-là, Zelba propose un récit qui prend aux tripes par sa justesse et le regard à la fois très humain et dépourvu de jugement qu’il porte sur des réalités de notre société. À travers les quelques protagonistes qu’elle met en scène et une situation de base très simple en apparence (un couple qui engage une nourrice pour leur enfant), l’auteure aborde des thèmes actuels qui interpellent et font réfléchir. En effet, il est question autant des conditions de travail des immigrés (en l’occurrence Udama, ainsi qu’une autre nounou), de l’épuisement professionnel (Claire) que des différences de culture, de classe et des injustices sociales ou encore des difficultés au sein du couple.

Il est impossible de rester indifférent à ce que vivent les personnages dont les actions individuelles reflètent bien la perte des repères et une certaine détresse, particulièrement en deuxième partie quand les événements prennent une tournure glissante. Un certain malaise s’installe d’ailleurs progressivement, d’abord par petites touches, puis dans des attitudes inappropriées qui laissent sourdre la révolte. Une non-acceptation qui, chez l’héroïne, va prendre une forme bien spécifique et conduire à un dénouement où elle parvient, brillamment, à tirer son épingle du jeu. Et si la manière n’est pas la plus franche, comment lui en vouloir vraiment, profondément ?

Le graphisme accompagne agréablement cette histoire d’un trait qui marque volontiers les contours et s’avère expressif. Les cadrages sont variés, tandis que le découpage assez aéré assure une bonne lisibilité. La disparité entre les deux mondes côtoyés s’avère, quant à elle, bien représentée visuellement.

Bande dessinée bien pensée et bien menée, Udama chez ces gens-là constitue une belle découverte.

Moyenne des chroniqueurs
7.0